Dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, régie par un racisme institutionnalisé, le quartier de Fietas a incarné pour ses habitants un îlot miraculeux de tolérance et de multiculturalisme. Jusqu’à sa chute, en 1991, le régime de « développement séparé » imposé par la minorité blanche a en effet relégué les habitants noirs, indiens ou appelés « de couleur » dans des zones peu accessibles et sous-développées, des ghettos à l’écart des centres urbains.

Mais Fietas, surnom donné à ce quartier de la banlieue de Johannesburg, pas loin du centre-ville, a fait figure, pendant un temps, d’exception. Chaque jour, des Sud-Africains de toutes origines ethniques venaient faire leurs achats dans ces rues très animées aux minuscules échoppes : magasins d’épices, boucheries, boutiques de vêtements… Cette bulle a persisté jusqu’à la fin des années 1970, quand le quartier, déclaré « blanc » dès les années 1950-1960, a été évacué de force et que la plupart des habitations ont été détruites.

David Goldblatt (1930-2018), figure majeure de la photographie sud-africaine, inlassable portraitiste de la vie quotidienne sous l’apartheid, a arpenté le quartier de Fietas (officiellement appelé Pageview) pendant toute sa vie. Il se sentait proche des boutiquiers installés là depuis des générations, peut-être parce que son propre père était un tailleur juif qui avait ouvert une boutique de vêtements près de Johannesburg, après avoir fui les pogroms en Lituanie.

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