LIVRE. « Le pouvoir est un miroir pour la gauche, il l’attire autant qu’il l’effraie. Cette ambivalence, cet éternel aller-retour scande son histoire ». Dans son dernier ouvrage – Le Défi de gouverner, la gauche et le pouvoir de l’affaire Dreyfus jusqu’à nos jours (Perrin, 416 p., 23 €), François Hollande définit, dès les deux premières phrases, la terrible équation à laquelle la gauche, née « dans une perspective révolutionnaire », est confrontée depuis le XIXe siècle.

« La gauche a-t-elle vocation à protester, à contester, à renverser un capitalisme prédateur et inhumain » ou « à prendre sa part dans la correction des dégâts d’un ordre qu’elle combat ? », fait mine de s’interroger François Hollande, comme en écho avec le Nouveau Front populaire (NFP), pris en tenaille entre l’intransigeance de Jean-Luc Mélenchon et les velléités de compromis du Parti socialiste. Pour François Hollande, ces interrogations sont purement rhétoriques. Dans son livre, l’ancien président y répond d’emblée, exprimant sa préférence pour la social-démocratie, qui a permis d’installer les « fondamentaux » de nos sociétés, comme le droit du travail, la laïcité, l’école publique ou la protection sociale. La radicalité doit subsister, mais rester aux marges.

Du Congrès de Tours de 1920, qui a fait émerger le Parti socialiste et le Parti communiste, au Front Populaire, en passant par le double septennat de François Mitterrand, et la « gauche plurielle » de Lionel Jospin, jusqu’aux derniers soubresauts du NFP, l’ancien chef d’Etat remonte le temps et s’attelle à démontrer, à travers l’histoire, la pertinence de sa thèse. Celle d’une gauche qui gagne lorsque son centre de gravité est réformiste, plutôt que radical. Dès le début du XXe siècle, cette dualité s’incarne à travers deux figures, celle de Jean Jaurès, qui souhaitait gouverner au nom de la consolidation de la République, et l’inflexible Jules Guesdes, qui prônait de rester à l’écart « d’un gouvernement bourgeois ».

Le Congrès d’Epinay, l’exemple à suivre

Mais la réussite de la gauche, c’est aussi la combinaison de deux pans antagoniques, qui se nourrissent l’un l’autre. L’auteur revient sur le Front Populaire et ses conquêtes sociales, ô combien d’actualité depuis l’émergence du NFP, gouverné par un Léon Blum qui « épouse les deux thèses », et réussit à allier la radicalité au « compromis assurant la stabilité et le progrès ». Pour Hollande, il ne peut être comparé au NFP, car, en 1936, la société est emportée par « un mouvement irrépressible et inventif », écrit-il en référence aux mouvements sociaux de l’époque. En outre, Blum « se convainc d’exercer le pouvoir », alors que les Insoumis « en dépit de leurs proclamations », ne souhaitent que « l’accélération du calendrier présidentiel ».

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