La désinformation sur la fraude électorale aux États-Unis s’est intensifiée en 2024, avec plus de 48 millions de messages sur X.
Une étude statistique sur les précédentes élections montre une émergence du thème à des moments bien différents.
Toutefois, les cas réels de fraude sont extrêmement rares.
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Élection présidentielle américaine
Machines truquées, récolte illégale de bulletins de vote, électeurs non-citoyens et même parfois morts… Depuis huit ans, la petite musique de la fraude électorale est l’un des thèmes de prédilection de ceux qui diffusent de fausses informations sur l’élection présidentielle américaine. Le tout, sans réel fondement : en 2020, l’Agence amércaine de cybersécurité et des infrastructures (nouvelle fenêtre) avait jugé le scrutin comme l’un des plus fiables et sécurisés de l’histoire du pays.
Pas suffisant pour d’importants responsables. Donald Trump, par exemple, continue à dénoncer de supposées tricheries. Dernière en date, lundi 4 novembre, lorsque l’ex-président a affirmé sans preuve que « 2600 bulletins de vote ont été rédigés de la même main » (nouvelle fenêtre). Des arguments largement repris sur les réseaux sociaux. Sur l’année 2024, les présumées fraudes électorales ont été au centre de 48,5 millions de tweets en anglais, selon les données de Visibrain (nouvelle fenêtre), outil de veille des réseaux sociaux.
Le plus partagé est #VoterFraud (« fraude électorale » en français). Il est apparu aux côtés du déjà très connu #StopTheSteal (« Arrêtez le vol ») devenu viral en 2020, ainsi que de #electioninterference ou #toobigtorig (« trop gros pour être truqué »). Les données montrent que la thématique est apparue dès le mois de février, avant de connaître un regain de popularité fin juillet lorsque Joe Biden a annoncé jeter l’éponge au profit de Kamala Harris . Le pic le plus net est observé sur les 3 dernières semaines avant l’élection, avec plus de 500.000 messages sur ce thème pour la seule journée du 30 octobre.
L’analyse des messages montre une montée en puissance de la désinformation sur la fraude électorale, avec des sous-thématiques très fortes. Surfant sur la polémique xénophobe créée de toute pièce autour de prétendus immigrés haïtiens mangeant des animaux domestiques , les accusations de votes de non citoyens américains ont été plus relayés en 2024 (nouvelle fenêtre) qu’en 2020.
Les accusations de fraudes se sont aussi concentrées sur les « swing states », ces fameux États-pivots où la tension électorale est la plus forte , dont l’un des plus visés a été la Pennsylvanie. Enfin, comme en 2020, les machines à voter ont aussi été sous le feu des critiques, beaucoup d’internautes filmant de prétendues erreurs observées lors des votes et les publiant sur les réseaux sociaux. Des allégations qui ne sont pas sans conséquence : dans les États de Washington et de l’Oregon (nouvelle fenêtre), des individus s’en sont pris, fin octobre, à des boîtes aux lettres destinées aux votes par correspondance, et ont détruit une centaine de bulletins.
La thématique émerge à différents moments selon les élections
Pour autant, cette thématique est loin d’être nouvelle, mais en s’intéressant aux deux élections présidentielles américaines précédentes, des différences existent dans la façon dont elle émerge. Lors de l’élection présidentielle de 2020, les mêmes thématiques et mots-clés avaient généré 19 millions de messages entre début janvier et le 3 novembre 2020, veille de l’élection, soit 2,5 fois moins qu’en 2024. Mais c’est véritablement après l’élection, à partir du 6 novembre 2020, que le pic d’utilisation de mots-clés autour de cette thématique avait été observé avec plus de 5 millions de tweets en quatre jours.
Des accusations de fraude concentrées entre novembre et décembre qui avaient trouvé leur paroxysme dans l’invasion du Capitole du 6 janvier 2021 où le slogan “Stop the steal” était omniprésent.
En 2016, on observe une tendance assez différente : 4,6 millions de messages sur la thématique du « vol du vote » avaient été publiés entre début janvier et le 7 novembre 2016, veille de l’élection, soit dix fois moins qu’en 2024. Le pic avait été observé aux alentours du 20 octobre, un mois avant l’élection, avant de se tasser après l’élection de Donald Trump.
Même si l’importance de l’utilisation d’un réseau social comme Twitter, devenu X depuis, peut expliquer la progression de ce thème en huit ans, il donne des indices sur comment, en trois élections, ce thème a régulièrement été au centre des discussions en ligne.
Seulement 252 cas de fraude recensés en 38 ans
Si la fraude électorale génère de nombreux messages, les faits montrent pourtant qu’elle constitue une part infime des votes lors de l’élection américaine. En s’appuyant sur les données de la fondation Héritage (nouvelle fenêtre), réputée proche du Parti républicain, le think tank américain Brookings (nouvelle fenêtre) a étudié les cas recensés aux États-Unis sur les 38 dernières années. Les résultats montrent que la fraude électorale, en particulier dans les États-pivots, souvent suivis de près, ne représente, dans le meilleur des cas, que 0.00008% des votes. Sur ces 38 années, seulement 252 cas avérés ont été recensés.
En 2020, sur la soixantaine de recours en justice déposés par les équipes de Donald Trump pour contester l’issue du vote, un seul avait été jugé recevable par un juge en Pennsylvanie (nouvelle fenêtre), avant d’être finalement annulé par la Cour suprême de l’État. Mais peu importent les faits : Donald Trump a déjà prévenu sur son réseau Truth Social que s’il est élu, il poursuivrait en justice « tous ceux qui ont triché » (nouvelle fenêtre). Une façon de préparer son électorat à contester une élection potentiellement serrée qui a déjà infusé dans les esprits : 49% des Américains (nouvelle fenêtre) pensent qu’une défaite de Trump entrainera des manifestations violentes à travers le pays.
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