Ils s’attendaient « au moins » à un secrétariat d’Etat. Face à l’absence, au sein du gouvernement de Michel Barnier, d’un portefeuille dédié à la politique de la Ville, les maires de banlieue se disent « révoltés », témoigne Gilles Leproust, maire (Parti communiste français) d’Allonnes (Sarthe) et président de l’Association des maires Ville et Banlieue de France. « Cette suppression marque un nouveau tournant dans le mépris affiché par les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron vis-à-vis des quartiers populaires », juge-t-il. Une décision rare depuis la première nomination, en 1990, d’un ministre d’Etat chargé de la ville. En 1997, le gouvernement de Lionel Jospin avait fait l’impasse pendant un an avant de nommer Claude Bartolone ministre délégué.

En 1995, celui d’Alain Juppé avait simplement rebaptisé la fonction « secrétariat d’Etat aux quartiers en difficulté ». Tandis qu’en 2005, lorsque Jean-Louis Borloo prend la tête du super ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, « tout le monde sait alors, même si cela ne figure pas dans l’intitulé, qu’il a la ville, c’est Borloo… », rappelle Michel Didier, le président du comité d’histoire de la politique de la ville. Les décrets d’attribution le confirment quelques jours plus tard. Petit décalage également lorsque Richard Ferrand est nommé ministre de la cohésion des territoires en 2017, avant que Julien Denormandie ne s’en charge officiellement, en 2018.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Entre Emmanuel Macron et les banlieues, le rendez-vous manqué

Vendredi 20 septembre, la veille de l’annonce du nouveau gouvernement et alors que la liste présentée par Michel Barnier avait circulé, les élus de Ville et Banlieue déploraient dans un communiqué que les quartiers « restent à ce jour les angles morts des politiques publiques » et plaidaient pour que la politique de la ville soit « rattachée au premier ministre pour une mobilisation interministérielle de tous les pans du droit commun ». Ils n’ont, à l’évidence, pas été entendus par le nouveau locataire de Matignon.

« Portée hautement symbolique »

La question des quartiers populaires, « par essence transversale, ne dispose donc plus de coordinateur, plus d’interlocuteur dédié », regrette Driss Ettazaoui, président de l’Association des élus de France, qui y voit une volonté « d’invisibiliser les 6 millions d’habitants de ces territoires alors qu’il s’agit d’un enjeu majeur de cohésion nationale ». « Cette décision, d’une portée hautement symbolique, est d’une violence inouïe », déplore-t-il.

La mise sous tutelle du ministère de l’intérieur du précédent secrétariat d’Etat à la Ville avait déjà été vécue comme un « signal très négatif qui n’amenait rien de positif à l’image des banlieues », commente Aziz Senni, fondateur de l’association Quartiers d’Affaires, qui œuvre pour le développement économique dans les quartiers populaires. Les 17 et 18 septembre, il organisait, à Paris, le premier Forum économique des banlieues, un événement qui a rassemblé 2 000 participants et les représentants de chacun des groupes parlementaires, « de La France insoumise au Rassemblement national en passant par Renaissance, Europe Ecologie-Les Verts, le Parti socialiste », se félicite-t-il. Seuls Les Républicains n’ont pas répondu à l’invitation.

Il vous reste 33.32% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version