Professeur d’histoire contemporaine à l’université Gustave-Eiffel, à Champs-sur-Marne (Seine-et-Marne), et responsable scientifique du laboratoire de recherche Futurs urbains, Loïc Vadelorge a consacré plusieurs ouvrages à l’histoire des universités franciliennes, et codirigé notamment Paris XIII, histoire d’une université en banlieue (Berg International, 2012) et De l’Université de Paris aux universités d’Ile-de-France (Presses universitaires de Rennes, 2016). Il rappelle que l’actuelle politique de mise en concurrence des universités est très éloignée de l’esprit qui a accompagné la création du système universitaire francilien dans les années 1960-1970.

Dans quel contexte des universités ont-elles été créées en périphérie de Paris ?

A partir des années 1950, l’Université de Paris fait face à une explosion du nombre d’étudiants (30 000 en 1930, 66 000 en 1960), au point qu’elle ne parvient plus à tous les accueillir dans ses locaux, qui sont alors ceux de la Sorbonne et de ses annexes comme la Halle aux vins. L’idée naît de créer des antennes de la Sorbonne en périphérie : une partie des sciences est transférée à Orsay (Essonne), une partie des lettres et de l’économie à Nanterre.

La crise de Mai 68 va percuter ce système et amener l’Etat à revoir sa carte universitaire. On dit souvent que l’objectif du pouvoir est alors de diviser les grosses universités pour mieux régner et contrôler la contestation étudiante. Mais l’objectif est avant tout de mettre en œuvre une politique d’enseignement et de recherche pluridisciplinaire et de dédensifier. En 1970, on passe d’une à treize universités, qui sont réparties intra et extra-muros.

Existe-t-il déjà une notion d’inégalités entre établissements ?

Pas du tout. Lorsque ces universités autonomes sont créées, il n’est pas question de créer une université à plusieurs vitesses, encore moins de « facs au rabais ». L’idée est de mettre la Sorbonne en banlieue. La première génération d’enseignants-chercheurs qui est envoyée dans ces établissements va s’atteler à mettre sur pied un premier, puis un deuxième et un troisième cycle sur le modèle de ce qui existe à la Sorbonne. C’est difficile, car le contexte, notamment budgétaire, est très défavorable, mais ils y parviennent.

La population étudiante continue de croître (257 000 étudiants en 1975) et, en 1986, le projet de loi Devaquet, qui veut instaurer une sélection des étudiants à l’entrée, provoque des grèves très importantes et la démission du ministre.

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