Nous n’avons que trop tardé à prendre conscience de la dangerosité du monde dans lequel nous avons basculé. Dans son intervention télévisée, le 5 mars, Emmanuel Macron a voulu prendre acte de cette situation devant la nation. L’exercice n’est pas facile. Il consiste, en effet, à expliquer à nos concitoyens que si la guerre n’est pas certaine, c’est néanmoins en s’y préparant que l’on a le plus de chance d’y échapper. Mais l’exercice est encore plus périlleux quand il est pratiqué par un président affaibli qu’une part de l’opinion soupçonne de se livrer à une opportune manœuvre politique.

S’il veut être à la hauteur des événements et dissiper le doute, Emmanuel Macron doit prendre deux risques. D’abord, celui de dire la vérité sur notre effort de défense, quand bien même celle-ci n’est pas conforme aux éléments de langage habituels. Ouvrir, ensuite, un débat inédit et approfondi sur les menaces qui pèsent sur la France et les moyens appropriés d’y faire face.

La première vérité, c’est que notre effort de défense ne se situe pas à 2 % du produit intérieur brut (PIB) comme on veut nous le faire croire, mais entre 1,6 % et 1,7 % : les 2 % ne sont obtenus qu’en intégrant artificiellement les pensions des retraités militaires.

La deuxième vérité est que la loi de programmation militaire 2024-2030, quoique facialement respectée, est en réalité compromise dès sa première année (notamment par les surcoûts des opérations extérieures et intérieures).

La troisième vérité est que cette loi est sous-financée : en l’état, un mur financier se profile dès l’horizon 2027. Sans l’avouer, on se dirige vers des étalements et des suppressions de programmes…

Pour comprendre où nous en sommes, il faut donc nuancer le discours officiel sur le redressement entrepris depuis 2017. Certes, l’effort est réel et doit être reconnu, mais le fait est qu’il se révèle insuffisant pour atteindre un format d’armée relativement modeste (puisqu’il n’avait pas encore intégré les enseignements du conflit en Ukraine). C’est dire que, pour une part, la hausse budgétaire récemment annoncée n’ajoute rien : elle permet de sortir de l’impasse dans laquelle nous nous trouvons. Dès lors que l’on souhaite faire davantage pour réparer des lacunes et massifier, on mesure la hauteur des marches financières qui sont devant nous. Tel est l’éclairage utile pour apprécier l’objectif évoqué d’un effort de défense pouvant dépasser 3 % du PIB.

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