Parfois, la solitude ressemble simplement à une salle de restaurant vide. Roberto Saviano est assis dans un coin, invisible de l’extérieur. C’est ici qu’il a ses habitudes, ici qu’il a le moins de risque de se faire tirer dessus. Les policiers qui le protègent attendent dehors. Le serveur venu prendre la commande lui jette un regard compatissant ; les autres clients de l’établissement déjeunent dans un espace adjacent.

Sous son bonnet noir, on reconnaît à peine l’écrivain de 45 ans qui s’est tant exposé sur les plateaux de télévision, sur sa chaîne YouTube aux 329 000 abonnés, dans les pages des journaux et dans les tribunaux. C’est le but. Mais, bientôt, son visage s’éclaire d’un sourire sincère et le Napolitain tombe le masque. Puis le bonnet.

Roberto Saviano est l’un des quelque 600 Italiens vivant sous protection, qu’ils soient menacés par la pègre ou les néofascistes de diverses mouvances. Depuis la publication, en 2006, de Gomorra, sur l’emprise criminelle de la puissante Camorra, la mafia de Naples et de sa région, les camorristes ont juré d’éliminer son auteur ; dix-neuf années que l’écrivain endure une « vie blindée », comme il l’appelle. Mais Roberto Saviano en est persuadé, un jour, tout ça s’arrêtera : « J’ai perdu mes 20 ans, puis mes 30 ans. A un moment donné, forcément, quelque chose changera. Je vivrai pleinement mes 50 ans. »

Rome ménagerait la Libye

Le quartier romain où on le retrouve et qui accueillait jadis des abattoirs, leurs employés et de nombreux bouchers s’est gentrifié. De ce passé disparu restent quelques plats typiques de viande, servis dans de vieux restaurants, comme ces tripes à la sauce tomate que Roberto Saviano a commandées. Mais il s’en veut de manger trop de pain. Il doit faire attention. Il n’a pas si souvent l’occasion de se dégourdir les jambes.

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