Un ancien salarié d’Amazon s’est confié au micro de TF1.
Son employeur lui reproche d’avoir quitté sa zone de travail pour scanner à distance des colis tout en prenant une pause.
L’homme décrit, pour le 20H, le fonctionnement de ces scanners mouchards, à l’origine d’une amende infligée par la Cnil.

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Le 20H

Remercié après des années à ranger en rayons des articles destinés à la vente. Un ancien salarié d’Amazon, qui souhaite rester anonyme devant la caméra de TF1, vient d’être licencié par le géant du commerce en ligne, qui lui reproche d’avoir quitté sa zone de travail en emportant des colis avec lui. Non pas pour les dérober, mais pour les scanner à distance. 

Scanner plusieurs colis tout en allant aux toilettes, par exemple, permet de garder un rythme régulier, et donc, en théorie, de rendre ses temps de pause indécelable par les managers. Si l’astuce est assez répandue dans l’entrepôt, elle est strictement interdite par l’entreprise. 

Chaque opération enregistrée en temps réel

« À ce moment-là, apparemment, le manager serait venu dans mon allée. Mais moi, je n’y étais pas. De 16h52 à 17h, je n’étais pas dans mon allée », se rappelle l’ancien employé au micro de TF1. Il explique qu’il était aux toilettes à ce moment-là. « Le RH me dit que c’est une fraude », affirme-t-il.

Scanner un produit en dehors du couloir est en effet un contournement de la règle. Mais ce qui interroge, c’est la méthode employée par l’entreprise pour s’en rendre compte. En effet, Amazon suit et enregistre chaque opération en temps réel grâce aux données obtenues par les scanners qu’utilisent les employés des entrepôts pour traiter les colis.

« Quand tu arrives en mise en stock, tu as ton scan et tu scannes ton badge. Sur ton badge, il y a un code-barres », décrit l’ancien  salarié, qui explique que ses actions pouvaient alors être « tracées » par « les chefs et les managers » depuis leur PC. « Ils savent où on se trouve, à quelle minute, à quelle seconde », confie l’homme. Une surveillance qui a eu un sérieux impact sur son bien-être au travail. « T’as l’impression d’être toujours suivi au boulot », déplore le salarié licencié, qui admet avoir constamment eu « la boule au ventre » dans l’entrepôt.

Amazon condamné à une amende record

Ce procédé, appliqué à des milliers de salariés en France, a été sanctionné en janvier dernier par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), qui reproche à Amazon d’avoir mis en place un « système de surveillance de l’activité et des performances des salariés excessivement intrusif ». Le gendarme de la vie privée a en particulier ciblé le recueil de données opéré par Amazon via les scanners des employés, des appareils qui enregistrent par exemple les temps d’inactivité supérieurs à dix minutes ou le rythme de traitement des colis « à la seconde près », selon la Cnil.

Le gendarme de la vie privée a infligé une amende record de 32 millions d’euros à Amazon France Logistique (AFL). Amazon a fait appel de cette décision devant le Conseil d’État. L’entreprise a refusé la demande d’interview de TF1, mais un porte-parole nous a précisé par mail qu’Amazon était « en profond désaccord avec les conclusions de la Cnil ». « L’utilisation de systèmes de gestion d’entrepôt est une pratique courante du secteur : ils sont nécessaires […] pour assurer le suivi des stocks et le traitement des colis dans les délais, conformément aux attentes des clients », a également écrit le porte-parole.


N.K | Reportage : David De Araujo, Jean-Philippe Héquette, Alexis Dubail

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