Un « small boat » transportant des migrants vers le Royaume-Uni à travers la Manche, an août 2024.

Le cabinet du ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a fait savoir, mardi 5 août, que l’accord conclu avec Londres prévoyant le retour en France de migrants arrivés au Royaume-Uni à bord de petites embarcations, en échange de l’envoi outre-Manche de migrants se trouvant en France, avait bien été « signé » mais « entrer[a] en vigueur demain », mercredi.

Le cabinet de M. Retailleau a ainsi corrigé une déclaration du premier ministre britannique, Keir Starmer, qui avait déclaré : « Aujourd’hui nous envoyons un message clair : si vous venez ici illégalement sur un petit bateau, vous risquez d’être renvoyé en France. » Le chef du gouvernement britannique s’était entendu sur ce projet pilote avec Emmanuel Macron, lors de sa visite d’Etat au Royaume-Uni, au début du mois de juillet.

L’accord, valable jusqu’en juin 2026 et dont les détails de mise en œuvre n’ont pas été précisés – notamment le nombre de migrants concernés –, vise à dissuader les personnes souhaitant traverser la Manche sur des embarcations précaires, passages organisés par des réseaux de passeurs. Depuis le début de l’année, 18 personnes sont mortes en tentant de rallier l’Angleterre clandestinement sur ces small boats, selon des données du ministère de l’intérieur français.

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« Nous voulons pouvoir l’étendre »

Les deux gouvernements ont signé le « texte final la semaine dernière » et la Commission européenne a « donné son feu vert à cette approche innovante pour décourager l’immigration illégale », a précisé lundi soir le Home Office dans un communiqué. La mise en œuvre effective de l’accord pourrait prendre quelques jours, avec des premières détentions de migrants ayant vocation à être renvoyés d’ici à la fin de la semaine, selon le Home Office.

« Bien sûr, il commencera avec un nombre réduit [de migrants] et augmentera ensuite, mais nous voulons pouvoir l’étendre », a déclaré mardi la ministre de l’intérieur britannique, Yvette Cooper, sur la radio de la BBC. Elle n’a pas confirmé le chiffre de 50 personnes par semaine évoqué dans la presse.

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Concrètement, les migrants repris par la France seront uniquement ceux arrivés au Royaume-Uni par small boat et dont la demande d’asile est jugée inadmissible. Dans l’autre sens, Londres acceptera des personnes se trouvant en France et ayant fait une demande sur une plate-forme en ligne, en donnant la priorité à celles ayant des liens avec le Royaume-Uni. Les deux gouvernements ont insisté sur le fait que les nouveaux arrivants seront soumis de part et d’autre de la Manche à un examen sécuritaire complet.

« Casser les filières »

Yvette Cooper a précisé que l’accord ferait l’objet d’une évaluation mensuelle et que des « ajustements » sont à prévoir. Bruno Retailleau a pour sa part loué sur X un « dispositif expérimental, dont l’objectif est clair : casser les filières ». De son côté, le commissaire européen chargé des questions migratoires, Magnus Brunner, a salué sur X l’accord, déclarant que « le nombre croissant de migrants qui ont traversé la Manche clandestinement est préoccupant ».

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Cinq pays du sud de l’Europe, dont la Grèce, l’Italie et l’Espagne, avaient exprimé en juin leur « préoccupation », disant craindre que la France ne renvoie ensuite les migrants vers le premier pays de l’UE dans lequel ils sont arrivés. Avec un nombre record de plus de 25 400 personnes arrivées au Royaume-Uni sur des petits bateaux depuis le début de l’année, soit une hausse de 49 % sur un an, le gouvernement travailliste de Keir Starmer est sous pression pour tenter d’endiguer ce phénomène.

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Ce projet a suscité de vives critiques dans le nord de la France, où certains élus estiment que le dispositif est trop favorable aux Britanniques, tandis que des associations d’aide aux migrants jugent qu’il va à l’encontre des textes internationaux sur la protection des réfugiés. Il s’inscrit dans les efforts des autorités britanniques pour accélérer les expulsions de déboutés du droit d’asile, au moment où le parti d’extrême droite Reform UK, de Nigel Farage, monte en puissance dans les sondages, et où des manifestations contre l’accueil de demandeurs d’asile ont régulièrement lieu dans le pays.

Le Monde avec AFP

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