Les agressions contre les pharmaciens ont explosé l’an dernier.
L’Ordre des pharmaciens en a recensé 536, soit bien plus d’une par jour.
Face à ce fléau, les professionnels tentent de se protéger du mieux qu’ils peuvent, comme l’a constaté le 20H de TF1.

Suivez la couverture complète

Le 20H

Elles ont bondi de 12% en seulement un an et de presque 80% en cinq ans. Selon les informations du 20H de TF1, 536 pharmaciens se sont fait agresser pendant qu’ils travaillaient en 2024. Certains clients mécontents n’hésitent plus à s’en prendre physiquement aux professionnels de santé. Face à ce danger avec lequel ils vivent tous les jours, ces derniers sont obligés de s’adapter, comme le montre notre reportage visible en tête de cet article.

Obligé de se défendre avec une bombe lacrymogène

Antoine Buzer se souvient bien du moment où un homme l’a violemment attaqué. Ce pharmacien de Saint-Florent-sur-Auzonnet, dans le Gard, s’est fait agresser il y a cinq mois par un client qu’il connaissait pourtant bien. Le motif était futile : Antoine avait refusé de lui délivrer des médicaments car les documents du patient n’étaient plus valides. « Il s’est mis à cracher partout sur les présentoirs, sur les vitrines et sur moi », se remémore-t-il.

Par chance, il possédait une bombe lacrymogène grâce à laquelle il a pu se défendre : « Je suis allé face à mon agresseur, qui s’était levé et qui allait m’agresser physiquement. Je lui ai mis un coup de bombe et il est sorti immédiatement. » Le pharmacien a finalement réussi à s’enfermer à l’intérieur pour attendre – dans la peur – les gendarmes, arrivés quarante-cinq minutes plus tard. « Il est resté dehors mais il était toujours très agressif et c’est là que les menaces de mort étaient réitérées, les objets dégradés. C’était assez violent et long. »

Si Antoine Buzer est ressorti de cet épisode sans séquelle physique, il reste persuadé que la violence est de plus en plus présente dans les officines françaises, que ce soit en zone rurale ou urbaine : « Une agression ordinaire mais c’est ça qui est grave. Les choses deviennent ordinaires. »

Tant que ça reste verbal, ce n’est pas trop stressant. Mais les agressions physiques, ça laisse des traces beaucoup plus sérieuses

Nadège Dumont, pharmacienne de l’Essonne victime d’une agression

Il y a seulement deux semaines, c’est une pharmacie de Morsang-sur-Orge (Essonne) qui a été prise pour cible. Les images de vidéosurveillance ont cette fois tout filmé : un homme insulte et menace la gérante, sous le regard médusé des autres clients. « Tant que ça reste verbal, ce n’est pas trop stressant. Mais les agressions physiques, ça laisse des traces beaucoup plus sérieuses », témoigne Nadège Dumont au micro de TF1. « Ça nous est arrivé de nous faire braquer avec des pistolets », ajoute-t-elle.

Caméras de vidéosurveillance, digicode à l’entrée… La responsable a pourtant tenté de construire le bâtiment le plus sécurisé possible pour son équipe. « On se dit toujours que quelqu’un à qui on a dit non dans la journée et qui s’est un peu énervé peut revenir pour nous casser la figure », s’inquiète aussi Virginie Dubuisson, une autre pharmacienne de la même officine.

Pour renforcer la sécurité de tous les professionnels de santé, un texte de loi va être examiné début mai au Parlement. Un délit d’outrage, similaire à celui existant déjà pour les policiers et les pompiers, pourrait alors être créé. « On va demander plus de sévérité sur les peines : des sanctions pécuniaires, pourquoi pas des travaux d’intérêt général, des mesures d’éloignement de la pharmacie… », propose Carine Wolf-Thal, présidente du conseil national de l’Ordre des pharmaciens.

En attendant, les gérants d’officine se forment… avec un ex-membre d’une unité d’élite de la police nationale qui leur apprend à réagir face aux personnes violentes. « Ce sont des outils techniques, qui sont des outils de négociateur mais qui peuvent tout à fait être transposés dans le monde de la santé », assure Laurent Combalbert, ancien négociateur du Raid. Il se dit cependant « surpris » face à l’engouement pour ce type de formation. Les pharmaciens préféreraient ainsi s’adapter plutôt que de se rendre au commissariat : malgré la hausse des actes de violence déclarés, seul un tiers font l’objet d’un dépôt de plainte.

Zoé SAMIN | Reportage TF1 : Caroline PHILIPPE et Lisa DUCAZEAU

Partager
Exit mobile version