La Slovénie dispute pour la première fois de son histoire les huitièmes de finale de l’Euro ce lundi 1ᵉʳ juillet à 21h face au Portugal, à suivre en live commenté sur TF1info.
Dans son effectif, un joueur au parcours sans égal qui force l’admiration et le respect.
À l’âge où la majorité des footballeurs commence à penser à la retraite, Josip Iličić vit en Allemagne le deuxième acte d’une lutte de longue haleine avec sa santé mentale.

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Euro 2024

Son entrée à la 75e minute face aux Anglais mardi (1-1) a été plus applaudie que les autres. Car il y a encore deux ans, personne n’aurait imaginé Josip Iličić fouler les pelouses de l’Euro 2024 sous le maillot slovène. À commencer par lui. Le milieu offensif de 36 ans ne s’est jamais étendu sur les maux qui l’ont tenu éloigné des terrains plusieurs années. « Tout le monde connaît mon histoire », souligne auprès de Sky Italia celui qui a pour habitude de refuser les interviews. Mais pour le pays où a éclos sa carrière de footballeur, il a bien voulu faire une exception.

L’effet dévastateur de la pandémie

Quand le journaliste italien lui demande s’il sait que son parcours est une inspiration pour tous, il répond que « ça lui fait sincèrement plaisir ». « Aujourd’hui encore, alors que j’entrais sur le terrain, un joueur m’a complimenté et m’a dit qu’il me respectait beaucoup », glisse Josip Iličić, laissant le soin à son interlocuteur d’identifier le Gunner Declan Rice. Mais ne comptez pas sur lui pour en dire plus. Il laisse aux autres le soin de raconter l’intense bras de fer qu’il a fini par remporter face à sa santé mentale. Son coéquipier à l’Atalanta Papu Gomez est le premier à avoir parlé de « dépression ». Soulignant que « l’esprit est une vraie jungle », son entraîneur Gian Piero Gasperini évoque, lui, une question « très sensible », « quelque chose au-delà du football ».

Par deux fois, Josip Iličić a pensé à raccrocher définitivement les crampons. Fragilisé par la mort soudaine de Davide Astori qui jouait avec lui à Palerme en 2018, il raconte à la presse italienne avoir « eu peur qu’il lui arrive la même chose ». Deux ans plus tard, la pandémie de coronavirus se déploie depuis la ville de Bergame où il est installé. Loin de sa femme et leurs deux filles qui sont confinées en Slovénie, le joueur perd pied. Il finit par rejoindre sa famille à l’été 2020 et manque notamment le quart de finale de Ligue des champions face au PSG.

« On entend des choses mais personne ne sait véritablement ce qu’il s’est passé. Le club, ses coéquipiers, tout le monde l’a protégé. Jojo a vécu une crise psychique extrêmement forte. Il a été pris de panique, probablement liée à ce qu’il a vécu enfant pendant la guerre » en Bosnie qu’il a fui à l’âge de quatre ans, raconte à So Foot Daniele Belotti, historien de l’Atalanta et ancien député de la Ligue du Nord. À l’été 2022, Iličić quitte définitivement l’Italie pour mieux rebondir deux mois plus tard au NK Maribor, en Slovénie.

Chez nous, personne ne s’occupait de ce genre de choses

Marko Suler, directeur sportif du NK Maribor

« Lorsqu’il est revenu, pour la première fois en vingt ans de carrière dans le football, j’ai entendu un joueur dire ouvertement qu’il prenait des médicaments », se souvient pour So Foot Marko Suler, le directeur sportif du club. « C’était un grand défi parce que chez nous, personne ne s’occupait de ce genre de choses », poursuit-il, assurant s’être entouré des « meilleurs psychologues et des meilleurs médecins » pour son joueur. Les premiers pas sont compliqués, mais se sont fait plus assurés, lui rouvrant la porte de la sélection dirigée par Matjaž Kek. Cette saison, Josep Iličić a marqué neuf buts en club et a joué son premier match avec la Slovénie depuis deux ans et demi.

Face à l’Angleterre le 25 juin, il a fait ses débuts à l’Euro à 36 ans. Quinze minutes qui ont eu valeur d’exemple, comme un symbole de la nécessité de préserver la santé mentale. Avant que ne commence le tournoi, un jeune Écossais de 20 ans a parcouru à pied les 1600 km qui séparent Glasgow de Munich afin de mettre en lumière cette même problématique, récoltant plus de 71.000 euros pour une association de prévention du suicide chez les hommes. Une discussion encore trop rare dans de nombreux milieux essentiellement masculins.


Delphine DE FREITAS

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