Le taux de chômage a reculé de 3 points entre 2015 et 2022, mais plusieurs indicateurs montrent que la pauvreté, elle, n’a pas diminué, selon un organisme rattaché à Matignon.
Le taux de personnes qui ne parviennent pas à couvrir au moins 5 dépenses de la vie courante a même grimpé d’un point.
Plusieurs raisons sont avancées, notamment le fait que certains des emplois créés n’ont pas entraîné de sortie de la pauvreté.

C’est un « paradoxe » qui saute aux yeux des experts. L’importante baisse du chômage entre 2015 et 2022 en France n’a pas fait reculer la pauvreté, constate le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) dans une étude (nouvelle fenêtre) publiée cette semaine. Face à une « embellie sur le marché du travail », les indicateurs de la pauvreté stagnent voire augmentent, et le sentiment de pauvreté « s’étend à des couches de population bien au-delà de la pauvreté monétaire », relève la présidente de son comité scientifique, Muriel Pucci. 

Tandis que le taux de chômage a reculé (nouvelle fenêtre) de 10,3% à 7,3% sur la période, le taux de pauvreté monétaire, défini comme la part des personnes gagnant moins de 60% du revenu médian, a très légèrement augmenté de 14,2% à 14,4%, selon les données recueillies par le comité scientifique de cet organisme rattaché au Premier ministre. 

Le taux de privation matérielle et sociale est lui passé de 12,1% à 13,1% de la population sur la période. Il mesure la part des personnes qui ne peuvent pas couvrir au moins cinq dépenses de la vie courante (nouvelle fenêtre) sur une liste de treize, comme avoir une voiture personnelle, chauffer son logement, s’offrir une semaine de vacances (nouvelle fenêtre) ou avoir une activité de loisirs régulière.

Des barèmes d’aides en « inadéquation » avec les besoins

En parallèle, la part des personnes se considérant comme pauvres a fortement augmenté sur la période, passant de 12,4% à 18,7%. Le sentiment de pauvreté a gagné du terrain chez les 20% de la population aux niveaux de vie les plus modestes, mais aussi dans la deuxième quintile (les 20% suivants), relève l’étude. « Les remontées des acteurs de terrain convergent sur un diagnostic de montée des tensions et de l’agressivité du corps social, en lien notamment avec la dématérialisation de l’accès aux droits (nouvelle fenêtre) et l’inadéquation des barèmes des aides aux besoins, y compris pour des personnes en emploi », relève Muriel Pucci.

Le CNLE a identifié trois principales raisons à la déconnexion entre l’évolution du chômage et celui de la pauvreté : certains des emplois créés n’ont pas entraîné de sortie de la pauvreté (nouvelle fenêtre), la dégradation de la situation des inactifs retraités ou invalides, et un niveau de vie des ménages les plus modestes qui a moins progressé que le seuil de pauvreté monétaire.

Le taux de pauvreté des retraités (nouvelle fenêtre) est lui en hausse depuis 2017 et atteint 10,8% en 2022, alors que la pension des nouveaux retraités est elle depuis 2017 « légèrement inférieure à celle de l’ensemble des retraités », contrairement à ce qu’il se passait auparavant, selon l’étude.

Le CNLE est composé des principaux acteurs institutionnels et associatifs impliqués dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Il est chargé de fournir des avis au gouvernement, d’assurer une concertation entre les différents acteurs et d’établir des indicateurs de suivi.

M.L. avec AFP

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