Le Premier ministre François Bayrou a indiqué mardi 21 janvier qu’il souhaitait scinder le projet de loi sur la fin de vie.
Stoppée par la dissolution de l’Assemblée nationale, la proposition de loi est pourtant portée par un député de son camp, Olivier Falorni (MoDem).
Auprès de TF1info, il dénonce une « mauvaise idée » et demande au chef du gouvernement de revoir sa position.
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Fin de vie : vers une aide à mourir en France
Nouveau flou autour de la loi sur la fin de vie. D’abord l’objet d’une convention citoyenne, le texte était initialement examiné à l’Assemblée nationale au printemps dernier, avant d’être brutalement stoppé par la dissolution voulue par Emmanuel Macron. Il aurait dû être réétudié début février, mais la censure du gouvernement consécutive au rejet du budget l’a encore reporté. Au point d’être abandonné ? Mardi 21 janvier, le Premier ministre François Bayrou a fait savoir qu’il souhaitait plutôt le scinder en deux, avec d’abord un texte sur le développement des soins palliatifs et un autre sur l’aide active à mourir.
Une idée largement rejetée par les défenseurs de la mesure… y compris dans son propre camp. La proposition de loi est pourtant portée par un député du parti de François Bayrou, Olivier Falorni (MoDem), cosignataire du texte avec 235 élus de tous bords. Auprès de TF1info, le député de Charente-Maritime dénonce une « mauvaise idée » et appelle le Premier ministre à revoir sa position. Entretien.
François Bayrou souhaite scinder le texte sur la fin de vie en deux : un sur les soins palliatifs, un sur l’aide active à mourir. Pourquoi y êtes-vous défavorable ?
Olivier Falorni : Par conviction et par expérience. L’idée de séparer les deux textes n’est pas nouvelle, mais aucun partisan de l’évolution vers une aide à mourir n’y est favorable. Je me refuse à cette stratégie dilatoire. Ensuite, j’estime que l’accompagnement de la fin de vie ne peut pas être tronçonné : il repose à la fois sur les soins palliatifs – une réponse primordiale – et le droit à une aide active à mourir, qui constitue l’ultime recours. Les deux sont liés. C’est aussi ce que dit la convention citoyenne, qui se désespère de voir que son travail n’aboutit à rien. Emmanuel Macron lui-même disait qu’il fallait un seul texte, car il s’agit d’un tout cohérent.
La proposition de loi est cosignée par neuf groupes, de LFI aux Républicains !
La proposition de loi est cosignée par neuf groupes, de LFI aux Républicains !
Olivier Falorni, député MoDem
Ce n’est pas ce qu’affirme le gouvernement. Sa porte-parole Sophie Primas a indiqué ce mercredi qu’il s’agissait de « deux sujets distincts » sur lesquels il faut laisser « la liberté aux parlementaires de répondre aux deux questions posées ». Comprenez-vous ce raisonnement ?
Pas du tout. Parler de la fin de vie, c’est parler de l’ensemble. Le texte est d’ailleurs conçu en deux parties : une sur les soins palliatifs, une sur l’aide active à mourir. Les députés peuvent déjà voter pour une partie et contre une autre. Chacun sait que les opposants à l’aide à mourir ne voteront pas le texte, même avec les soins palliatifs. C’est un faux argument.
D’autant que ce texte global est largement soutenu par une Assemblée pourtant si divisée…
La proposition de loi est déposée avec 235 signataires – dont la numéro 2 du gouvernement, Élisabeth Borne – appartenant à neuf groupes politiques différents, de La France insoumise jusqu’aux Républicains ! Et il y en aura d’autres : rien que sur la journée de mardi, la déclaration de François Bayrou a poussé cinq nouveaux députés à cosigner. Cela montre la détermination des parlementaires pour voter ce texte globalement et non séparément.
Avec un texte général, ne prenez-vous pas le risque qu’il n’y ait aucune avancée pour les soins palliatifs en cas de rejet ?
La vraie loi sur les soins palliatifs, c’est le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Les soins palliatifs ont besoin d’argent en urgence. Dans le PLFSS, il y a la première traduction de la stratégie décennale de développement des soins palliatifs, qui prévoit 100 millions d’euros supplémentaires par an. S’il est voté en février, la loi sur les soins palliatifs aura déjà été faite. Dès mars, il faudra donc démarrer sur une loi complète.
Que François Bayrou fasse la même chose que Michel Barnier
Que François Bayrou fasse la même chose que Michel Barnier
Olivier Falorni, député MoDem
En décembre, vous disiez à TF1info que « celui qui s’aviserait à renvoyer aux calendes grecques un texte qu’une immense majorité de Français attend commettrait une lourde faute politique ». François Bayrou commet-il une faute politique ?
Il faut relativiser. Nous ne sommes plus avant la dissolution : l’exécutif ne décide pas de l’intégralité de l’ordre du jour de notre Parlement. Si 235 députés décident que ce texte transpartisan doit être inscrit à l’ordre du jour, il le sera. Lors de sa déclaration de politique générale, François Bayrou a affirmé qu’il inscrivait ce sujet dans le cadre de l’initiative parlementaire, avec une coopération entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Nous en sommes exactement là.
Vous êtes un député du groupe MoDem, François Bayrou est le président de ce parti… Quel message lui adressez-vous ?
Je n’attends pas de François Bayrou qu’il soutienne ce texte, mais plutôt qu’il fasse la même chose que son prédécesseur. Michel Barnier n’était pas un militant de l’aide active à mourir, mais il avait accepté de donner du temps législatif. Le texte était inscrit au 3 février et son examen devait durer deux semaines. Je demande à François Bayrou de prolonger ce que Michel Barnier avait accepté.
Vous lui en avez parlé ?
Oui, et cela fait longtemps que nous en parlons. Nous avons des convictions différentes et je les respecte profondément. Pour autant, je n’accepte pas que l’on refuse que ce texte, qui est la continuité du travail de la convention citoyenne et de l’engagement du président de la République, ne soit pas mis en œuvre.