
L’historiographie de l’empire colonial français a longtemps oscillé entre le récit idyllique de l’apport des bienfaits de la civilisation aux peuples « arriérés » et le récit dramatique de l’exploitation impitoyable des peuples opprimés. Comment concilier les principes inscrits au fronton des mairies de la République, « liberté, égalité, fraternité », avec la réalité brutale de la colonisation ? C’est la conquête militaire d’Etats indépendants (régence d’Alger, empires d’Annam et du Mali, royaume de Loango…), et non de « tribus sauvages », qui permet à la France de constituer le deuxième empire colonial du monde.
La « science » anthropomorphique théorise une hiérarchie raciale où trône à son sommet la race blanche, tandis que les expositions coloniales, les récits des explorateurs et les exploits des troupes coloniales popularisent cette différence d’humanité dans les représentations culturelles des Français, jusqu’aujourd’hui encore. Une inégalité entérinée en 1881 par le code de l’indigénat, qui crée un statut juridique inférieur pour les « sujets » de l’Empire – il en comptera 60 millions à son apogée – alors que les colons européens sont citoyens.
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