Le 16 janvier 1979, Mohammad Reza Pahlavi, le dernier chah d’Iran, s’envolait de l’aéroport de Téhéran pour Le Caire, en Egypte. Un voyage sans retour dans un pays emporté par une révolution islamique. Le même jour, un couple et deux enfants embarquaient précipitamment dans un avion pour la Grèce. La plus jeune de la famille, âgée de 8 ans, s’appelait Mozhgan. Elle se prénomme aujourd’hui Orly et fait partie des figures connues en Israël pour la défense des droits humains : Orly Noy dirige B’Tselem, la plus influente ONG dans ce domaine, la plus critique aussi contre l’occupation israélienne dans les territoires palestiniens.
Cheveux noirs coupés court, sourire généreux, cette quinquagénaire, qui coanime également le site d’information « + 972 », où travaillent des journalistes israéliens et palestiniens, n’a pas l’habitude de mâcher ses mots. « Je suis israélienne, mais, si c’était à refaire, je ne ferais pas l’armée, ça non ! », s’exclame-t-elle. La guerre totale menée par l’Etat hébreu à Gaza, en représailles à l’attaque terroriste du Hamas sur son sol le 7 octobre 2023, révulse la militante. La guerre contre l’Iran, ces douze jours pendant lesquels, entre le 13 et le 24 juin, Israël a frappé sans relâche le territoire adverse, bouleverse la petite fille d’hier née juive, à Téhéran, en 1970 : « Ça m’a brisé le cœur. Mon pays bombardait mon pays. »
Naître en Iran et grandir en Israël ne pose pas seulement des problèmes d’intégration, comme pour tout migrant. C’est aussi une double appartenance impossible à concilier, une déchirure, qui s’élargit chaque jour davantage : l’Iran constitue une « menace existentielle » aux yeux d’Israël ; Téhéran ne reconnaît pas l’existence de l’Etat hébreu, dont il a juré la perte.
Transmettre sa culture
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