Le combat change de dimension. Nous étions mobilisés pour défendre l’Etat de droit et les libertés constitutionnelles contre les pouvoirs autoritaires dans le monde et les dérives illibérales en Europe. Nous voici dorénavant interloqués et appelés à redoubler de vigilance après l’élection d’un président officiellement soutenu par les milliardaires de la tech aux Etats-Unis. Comme dans nombre d’autres pays, c’est le pouvoir de l’argent qui prétend annoncer définitivement son règne. La milliardocratie, le pouvoir des milliardaires, constitue la menace ultime contre la démocratie.

Faut-il rappeler que nous vivons dans un monde où l’accumulation de richesses aux mains des plus fortunés atteint les limites de l’extrême et de l’indécence ? Dans son dernier rapport, Oxfam, organisation internationale qui lutte contre les inégalités et l’injustice de la pauvreté, constate qu’en 2024 chaque milliardaire de la planète a amassé 2 millions de dollars (1,9 million d’euros) supplémentaires par jour. Et souligne que cet emballement obscène n’est pas tant lié au mérite et au travail qu’aux effets multiplicateurs de fortunes esquivant la solidarité fiscale ou s’appuyant sur des situations de monopole.

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Les ultrariches n’ont même plus la réserve morale de composer avec les lois et les règles qui organisent la vie démocratique. Le temps de l’influence discrète et de l’accaparement des médias pour préserver leurs intérêts semble dépassé. Il s’agit maintenant de remettre ouvertement en cause tous les efforts pour réguler le système capitaliste, protéger la concurrence et, surtout, assurer un minimum de répartition de la richesse au bénéfice des plus démunis. Plus grave, la dénonciation sans complexe des accords internationaux pour limiter le réchauffement climatique témoigne d’une vision délétère de l’avenir de la planète.

Défiance généralisée

Au nom de quoi cet argent roi prétend-il acheter les décideurs politiques et convaincre des électorats déboussolés ? Au nom d’une idéologie qui suppose que la loi du plus fort est le meilleur ressort du progrès ; que les notions de bien commun ou de service public sont contraires à la nature humaine ; que la liberté d’expression et le respect de la législation ou, plus simplement, de la vérité sont antinomiques. Il ne faut pas en relativiser les effets. Même si la violence des mots ou des annonces à l’égard des immigrés, des personnes transgenres ou du combat climatique ne peut pas toujours se traduire en actes, grâce à la mobilisation des juges ou de la société civile, le mal fracture la vie démocratique.

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