À 38 ans, Gaël Monfils s’apprête à en découdre lors de l’édition 2025 de Roland-Garros, qui débutera dimanche prochain.
L’occasion pour lui de revenir sur le début de son histoire d’amour avec son sport.
Un parcours jalonné de sacrifices et de triomphes qu’il décrit, avec sincérité, dans le portrait qui lui est consacré ce dimanche dans « Sept à Huit ».
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Sept à huit
Plus de vingt ans après ses débuts sur la terre battue, il n’envisage pas encore de ranger ses raquettes, pour le plus grand plaisir du public français qui vibre au rythme de ses services dévastateurs. À 38 ans, Gaël Monfils sera bel et bien au rendez-vous porte d’Auteuil pour participer à l’édition 2025 du tournoi de Roland-Garros, qui se tiendra du 25 mai au 8 juin.
Mais avant de tenter de remporter le prestigieux titre à Paris, l’ex-numéro 6 mondial a accepté de se dévoiler sans détour, face à Audrey Crespo-Mara dans Sept à Huit, sur cette passion qui l’anime depuis sa plus tendre enfance. « À 2 ans et demi, j’ai joué au tennis pour la première fois (…) avec mon papa et ma maman », confie-t-il. Sa mère, infirmière à l’hôpital, et son père entraîneur de foot « jouaient pour s’amuser ». « J’ai essayé, j’ai accroché », souligne-t-il.
Le tennis, une discipline plus stricte
La légende dit même que sa vocation est véritablement née en raison d’une balle de tennis reçue sur la tête… et envoyée par son père. « J’ai toujours voulu, peut-être, me venger de mon père et le battre. Apparemment, ça a été le déclic », sourit celui que l’on surnomme affectueusement « La Monf ». Même si ses parents échangeaient quelques balles pour s’amuser le week-end, rien ne prédestinait Gaël Monfils à évoluer dans cette discipline jugée élitiste.
« Là où j’ai grandi, le tennis, ce n’était pas forcément un sport qu’on connaît. Ce n’est pas forcément un sport populaire, aussi », admet-il, lui qui a grandi dans une HLM à Paris. « C’était très loin de chez moi parce que j’habitais dans le 19e, il fallait qu’on aille dans le 16e », raconte-t-il.
Sa mère l’accompagnait alors à ses entraînements et lui imposait le fameux polo blanc. « Elle me disait : ‘Rentre bien ton polo dans le short' », glisse le tennisman, qui a dû s’adapter à un sport « où il y avait un peu plus de calme qu’au foot ». Une discipline plus stricte, aussi, « plus cintrée ». « Quand je suis arrivé, j’ai commencé à faire des glissades, j’ai commencé à serrer le poing, j’ai commencé à m’exprimer, à être moi-même. Bien sûr, en respectant les règles, mais en étant différent », se remémore-t-il.
« Il n’y a pas énormément de joueurs noirs »
Enfant, Gaël Monfils admirait Yannick Noah, qui entra en 1983 dans la légende du tennis français en remportant le tournoi de Roland-Garros. « J’adorais la personnalité qu’il avait, je le trouvais incroyable », affirme-t-il. À l’époque, le tennis souffrait d’un manque de diversité. Yannick Noah était donc l’un des rares champions auquel Gaël Monfils pouvait s’identifier. « On va dire les termes, c’est vrai qu’il n’y a pas énormément de joueurs noirs. Yannick était l’un d’eux. Il y avait les sœurs Williams. J’ai grandi, j’ai vu des extraits d’Arthur Ashe, qui est devenu mon idole auparavant. En grandissant, j’en ai vu peu, on va dire », reconnaît le joueur de tennis.
« J’avais quand même beaucoup d’amis de couleur foncée, noirs, métisses qui jouaient avec moi, comme Jo-Wilfried Tsonga, d’autres qui étaient en internat avec moi », nuance-t-il, avant de préciser : « Je ne ressentais pas forcément ce décalage, parce qu’on était plusieurs dans ma génération à émerger. »
Des sacrifices « d’argent, de temps »
Comme de nombreux sportifs de haut niveau, Gaël Monfils a quitté le domicile familial très jeune, à 13 ans. Un éloignement qui l’a empêché de voir « grandir [son] petit frère », Daryl, devenu lui aussi joueur de tennis. « Ça a été, peut-être, le premier petit regret », concède-t-il. Dès ses débuts dans le tennis, le jeune Gaël Monfils a pu compter sur le soutien précieux de ses parents. C’est même grâce à leurs sacrifices, dit-il, qu’il a pu évoluer ainsi.
Le sacrifice d’une mère qui laisse partir son enfant, d’abord. Gaël Monfils avoue d’ailleurs avoir voulu partir à 12 ans, départ précoce que sa mère a fermement refusé, avant de le laisser quitter le cocon un an plus tard. « Après, il y a tous les sacrifices d’argent, de temps », poursuit Gaël Monfils, dont la mère est devenue infirmière de nuit pour pouvoir « [l’]emmener en tournoi, à l’entraînement ».
Fort de cet accompagnement, Gaël Monfils a pu devenir, des années plus tard, numéro 1 français, atteindre la 6e place mondiale en novembre 2016 et remporter 13 tournois sur le circuit ATP. Avec, notamment, un service monstrueux pouvant partir à « 230 km/h », note-t-il.
« Mes parents m’ont toujours dit de prendre du plaisir »
Au-delà de ses performances, c’est sa jovialité qui séduit aussi le public français. D’où vient-elle ? « C’est l’éducation, et surtout la prise de conscience, très vite, de la chance que j’ai de faire un sport magnifique. Un sport qui devient mon job, qui me fait découvrir le monde entier et qui, bien sûr, me fait gagner de l’argent. Mes parents m’ont toujours dit de prendre du plaisir », insiste-t-il.
Il n’y a pas de vraie vie familiale
Il n’y a pas de vraie vie familiale
Gaël Monfils
Et ce, même si ses entraînements et ses tournois l’amènent à manquer de nombreux événements importants avec ses proches. « Il n’y a pas d’anniversaire, pas de vraie vie familiale, parce qu’on a des responsabilités et des obligations. Oui, tu es dans un bel hôtel, mais peut-être que tes potes d’enfance sont en vacances ensemble et qu’ils s’amusent. De temps en temps, ça manque un petit peu », déplore-t-il.
D’autres Roland-Garros à venir
Si l’actuel 43e joueur mondial ne compte pas tirer sa révérence demain, il pense déjà à l’après-tennis. « J’ai envie de travailler dans la finance », révèle Gaël Monfils, fortement intéressé par ce monde auquel il a été confronté dès la réception de ses premières, et considérables, rentrées d’argent. Le joueur compte aussi, évidemment, passer des moments privilégiés avec sa fille Skaï, née en 2022 de son union avec la championne de tennis ukrainienne Elina Svitolina, ex-numéro 3 mondiale. « J’espère avoir un peu plus d’enfants aussi (…). Ce qui est un peu plus dur dans ma situation, c’est que ma femme est sportive de haut niveau aussi. »
Gaël Monfils se concentre pour le moment sur Roland-Garros, cet « endroit magique » où il a « la chance d’avoir [sa] famille présente, [ses] amis et un soutien extraordinaire par le public français ». « Je sais qu’il ne va pas m’en rester dix. Peut-être neuf », plaisante-t-il, avant de marteler : « Non, ce ne sera pas mon dernier. »