La loi Duplomb a été en partie censurée par le Conseil constitutionnel, jeudi 7 août, notamment pour son article visant à réintroduire par dérogation l’acétamipride [un pesticide néonicotinoïde banni en France depuis 2020]. Mais cette décision ne clôt pas le débat. Elle révèle, au contraire, une faille structurelle de notre démocratie : la place accordée à la science dans la décision publique reste incertaine, peu normée et profondément vulnérable.

Plus de 2 millions de citoyens ont signé une pétition dénonçant dans cette loi une « aberration scientifique ». Ils ont exprimé par là leurs inquiétudes sur les effets environnementaux et sanitaires de ce texte. L’analyse précise du processus décisionnel lui-même nous interroge : quelle garantie d’instruction rigoureuse, quelle transparence sur les savoirs mobilisés ont été assurées dans cette procédure ?

La mobilisation citoyenne répond à un déficit démocratique plus profond qui concerne les conditions d’instruction de cette proposition de loi à la lumière des savoirs disponibles. Car si la promesse d’une politique informée par la science fonde l’architecture normative des démocraties libérales, encore faut-il qu’elle soit tenue.

Absence de transparence

Le premier enseignement de cette affaire est procédural. Depuis 2009, les projets de loi du gouvernement doivent être accompagnés d’études d’impact. Mais cette exigence ne s’applique pas aux propositions de loi d’initiative parlementaire. Or, depuis la dissolution de juin 2024, ces textes se sont multipliés, occupant dans la fabrique législative une place croissante. La proposition du sénateur Laurent Duplomb [Les Républicains, Haute-Loire] en fait partie. Et elle illustre les dérives que cette faille procédurale rend possibles, en ayant progressé jusqu’au vote sans être adossée à un appareil critique et bibliographique approfondi et public.

De surcroît, si des experts issus d’instituts publics de recherche (Inserm, CNRS, Inrae, Anses) ont bien été auditionnés en commission, aucune trace n’a été rendue publique : ni les questions posées ni les réponses apportées. Les parlementaires ont-ils voté en connaissance de cause ? Les citoyens ont-ils pu juger de la solidité des arguments scientifiques ? Rien n’est moins sûr. Cette absence de transparence alimente légitimement la défiance.

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