Les Français ont la passion de l’égalité, constatait Tocqueville. Et pourtant, ils ne s’entendent pas sur la façon de la mesurer. Dans la fureur du débat sur la taxe Zucman, les uns ont insisté sur l’explosion du patrimoine des 0,1 % les plus riches et l’aggravation du taux de pauvreté. Les autres ont répondu en mettant en avant le sérieux coefficient de Gini, qui mesure scientifiquement la répartition des revenus (ou de la richesse) au sein de la population. Or, d’après cette méthode imaginée par le statisticien italien fasciste, mais surdoué, Corrado Gini (1884-1965), la France est, du point de vue des inégalités, dans la moyenne des pays riches.

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Mais une précision s’impose : elle est dans la moyenne des pays riches… « après redistribution ». Seul le système fiscalo-social français, avec son impôt progressif et ses allocations, permet de contenir l’ampleur des écarts. En revanche, comme le montre une étude publiée le 8 juillet par l’Observatoire des inégalités, la France est, parmi ces pays, l’un des plus inégalitaires avant redistribution.

Tout se passe comme si l’on avait écrasé les revenus primaires des Français se situant dans la moitié basse de l’échelle, pour ensuite les « regonfler » grâce à des transferts. La France est le seul pays à présenter un tel profil. Dans les pays européens qui lui sont comparables, les rémunérations primaires sont plus élevées, ce qui allège la nécessité d’une redistribution.

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L’une des causes de cette anomalie française, c’est la « smicardisation du salariat », souligne une note publiée le 29 septembre par la Fondation Jean Jaurès, sous la signature de Guillaume Duval. En France, aujourd’hui, la moitié des salariés du privé gagnent entre un smic et 1,5 smic, soit de 1 800 euros à 2 700 euros brut par mois. Si l’on excepte la Grèce et le Portugal, c’est la concentration des salaires dans le bas de l’échelle la plus forte d’Europe !

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