Depuis plusieurs semaines, Sciences Po occupe les colonnes et les éditoriaux des médias en raison des mobilisations étudiantes en soutien légitime aux populations civiles de Gaza sous la gouverne du comité Palestine. Les mots d’ordre dénoncent la guerre jusqu’au-boutiste menée par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou contre le Hamas, en représailles à des assassinats barbares perpétrés par les combattants de cette organisation, les 7 et 8 octobre 2023, ainsi que les implications indirectes des pays occidentaux soutenant directement ou indirectement Israël dans ce conflit.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Sciences Po dans la fièvre du conflit à Gaza, entre blocages, tensions, débats et pression médiatique

Au-delà, ils réclament la levée des sanctions disciplinaires prises à l’encontre des étudiants les plus impliqués dans l’occupation et les blocages de l’établissement ainsi que l’examen des coopérations engagées avec les universités ou les entreprises israéliennes. Malgré la volonté constante de dialogue de la direction avec les étudiants mobilisés, une évacuation par les forces de l’ordre a été menée à deux reprises pour disperser les manifestants et rouvrir l’accès aux bâtiments.

C’est donc le visage d’un Sciences Po radicalisé, en proie à la détermination d’une minorité d’étudiants et d’étudiantes, parmi les plus politisés, et infiltré par certaines forces politiques, profitant de ces événements pour solidifier leur assise électorale dans la jeunesse étudiante et dans la population musulmane, qui est donnée à voir en France et sur la scène internationale. Cette image rejoint celle qui agite depuis plusieurs semaines les campus américains et qui fait l’objet de prises de position et de conflits identiques, tant dans le cénacle universitaire que sur la scène politique américaine dans le contexte préélectoral de l’élection présidentielle de novembre.

Lire aussi le récit | Article réservé à nos abonnés La guerre à Gaza met les campus américains en effervescence

Sur le terrain politique, l’instrumentalisation qui est faite de la situation à Sciences Po, à grand renfort d’amalgames et de dénonciations, allant même jusqu’à remettre en cause sa gouvernance et son histoire récente, fait plus de ravages que de bien à l’institution, qui a plus que jamais besoin d’être soutenue.

Stéréotypes outranciers

Mais on a peu parlé jusqu’à présent du vrai visage de Sciences Po, des cultures politiques des étudiants, de leurs valeurs comme de leurs préoccupations, de leurs engagements et des formes de leurs mobilisations. Un examen attentif de leur profil sociopolitique, documenté par une vaste consultation réalisée en mai-juin 2022, et reconduisant une première enquête, réalisée en 2002, soit vingt ans plus tôt, permet de mieux comprendre ce qu’il se joue et de nuancer les stéréotypes souvent outranciers qui ne correspondent pas à la réalité et à la diversité de la population étudiante. Si bien des caractéristiques spécifiques peuvent expliquer les mobilisations actuelles, il en est d’autres qui invitent à la nuance et qui viennent rappeler la pluralité des opinions et des comportements qui s’expriment à Sciences Po.

Il vous reste 59.95% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version