Et si venait enfin le temps des enfants ? La convention citoyenne qui vient de s’ouvrir se centre sur « les temps de l’enfant » : moins d’heures de classe, plus d’heures de classe, moins de vacances, plus de vacances, école le samedi ou le mercredi… Alors que la véritable question n’est pas le temps de présence scolaire ou extrascolaire, mais bien quels sont les véritables besoins des enfants d’aujourd’hui, comment nous les outillons pour y répondre, et plus encore, quelle place nous leur offrons dans notre monde. En d’autres termes, à quoi bon aller à l’école si ce n’est pas pour en ressortir mieux armé, plus à même de se projeter dans l’avenir, le sien et celui de la planète ?

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Et cela ne se mesure pas en quantité de contenus ingurgités, ni en leçons apprises, en emplois du temps plus ou moins remplis, mais en capacité à imaginer, à se forger une opinion, et surtout en appétit de la vie et des autres. La remarque (attribuée à divers auteurs) selon laquelle « un enfant n’est pas un vase qu’on remplit mais un feu qu’on attise » me semble nous indiquer le chemin. Et notre mission, à nous écrivains, fabricants d’objets culturels au sens large, est de fournir du combustible à ce feu.

Seulement voilà, encore faut-il prendre les enfants au sérieux. Se débarrasser des clichés – et ils sont légion – qui nous interdisent d’avoir confiance en leur capacité de compréhension, de motivation et aussi d’expression. J’écris et je publie en direction de la jeunesse depuis plus de vingt-cinq ans, et je ne cesse de me heurter à ce scepticisme. Celui des parents souvent, celui des enseignants aussi. De la poésie pour les petits ? On me dit qu’il leur faut des jeux sur les mots, de la fantaisie, un peu d’absurde, de l’insouciance, des cerises ou des petites fleurs, de préférence à cloche-pied. Le maître-mot : être « ludique », les divertir, ne pas les ennuyer, ne pas les attrister…

Se mettre à la place de

Comme si les enfants vivaient dans une bulle. Comme si ce monde en folie, terriblement anxiogène, leur était étranger. Comme si on ne laissait pas, en leur présence, le téléviseur déverser ses images d’horreur. Comme si on ne parlait pas devant eux. Et qu’on ne les laissait pas seuls, en réalité, avec leurs peurs et nos peurs.

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