Certaines grandes affaires criminelles laissent pour l’histoire une plaidoirie mémorable, un aveu inattendu ou un verdict retentissant. Du procès des viols de Mazan, chacun retiendra la leçon de courage et de justice de Gisèle Pelicot, sa détermination à affronter ses agresseurs au grand jour, parce qu’elle « ne veu[t] plus » que les femmes victimes de viol « aient honte ». Mais, au-delà de leur effet d’effarement et de questionnement sur le comportement des hommes, les terribles audiences de la cour criminelle du Vaucluse ne peuvent pas rester sans conséquence sur la société dont elles ont révélé des faces cachées. « Par votre verdict, vous signifierez (…) qu’il n’y a pas de fatalité à subir pour les femmes et pas de fatalité à agir pour les hommes, a conclu, mercredi 27 novembre, à l’adresse de la cour, le ministère public chargé de porter l’accusation. Et vous nous guiderez dans l’éducation de nos fils. »

Au même moment, au Sénat, le ministre délégué à la réussite scolaire, Alexandre Portier, déclarait que le futur programme d’« éducation à la vie affective et relationnelle et à la sexualité », n’est « en l’état pas acceptable ». M. Portier ne faisait que relayer la campagne des milieux catholiques ultra-conservateurs et de l’extrême droite contre un texte en cours de finalisation, qui vise à concrétiser l’obligation, rarement effective, d’assurer « au moins trois séances annuelles » d’information et d’éducation à la sexualité dans les écoles, collèges et lycées prévue par une loi de 2001.

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Sous prétexte que ce programme, très prudent, aborde la notion de consentement (en CE2), qu’il ne fait l’impasse ni sur l’existence de familles homoparentales, ni sur la différence entre genre, sexe et orientation sexuelle, ni sur l’existence des violences sexistes et sexuelles, il est accusé de faire entrer à l’école la prétendue « théorie du genre » (une expression destinée à caricaturer les « études de genre »). Un véritable « viol des consciences et de l’intimité », tonne Ludovine de La Rochère, présidente du Syndicat de la famille, nouvelle appellation de la « Manif pour tous ». Le très officiel Secrétariat général de l’enseignement catholique n’est pas en reste, qui demande que le programme soit « profondément remanié ».

Ne pas laisser les élèves seuls

Dix ans après une offensive comparable qui avait obligé l’éducation nationale à retirer les « ABCD de l’égalité », programme de sensibilisation aux stéréotypes de genre accusé d’enseigner la masturbation aux enfants et d’inciter à leur travestissement, la montée en puissance de l’extrême droite et de ses fake news ne rend le danger que plus grand.

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