Les négociations entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur, qui regroupe l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay – rejoints par la Bolivie et le Venezuela, ce dernier pays étant suspendu depuis lors, pour cause de régime autoritaire –, ont commencé en 1999 dans le cadre des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces règles ont été contestées d’emblée par les sociétés civiles à l’origine de la première manifestation internationale de l’histoire, organisée le 30 novembre de la même année, à Seattle. Etaient mis en cause l’iniquité de ces règles, leur atteinte à la souveraineté des Etats, leur justice privée, leur dynamique de concentration du pouvoir aux mains des multinationales, leur axiome de supériorité du commerce sur toutes règles sociales, climatiques, environnementales.
Un ultime coup de théâtre est intervenu en 2016, avec le gel des négociations et le blocage du traité transatlantique, en raison de l’opposition de l’opinion publique européenne et de l’élection de Donald Trump, hostile au traité. Dans ces conditions, l’accord signé en décembre 2024 par l’UE, dans une opacité totale, y compris vis-à-vis des députés européens, apparaît comme une résurgence du passé, imposée avec les méthodes du passé…
La Commission européenne semble aussi avoir fait fi des enjeux géopolitiques : l’essor des régimes autoritaires élus par réaction aux dégâts nationaux du libre-échange qui entraînent désindustrialisation, désertification des territoires, privatisation des services publics et financiarisation générale. A cela s’ajoutent la guerre en Ukraine, avec son impact sur les échanges agricoles et le commerce énergétique, et la réélection de Donald Trump, champion du protectionnisme. Ce qui conduit à un bilan globalement négatif des règles de l’OMC et de leur dogme d’autorégulation des marchés, grâce à la compétitivité, carburant de la croissance illimitée.
Fantôme du monde d’avant
L’état climatique et écologique lamentable de la planète est là aussi pour infirmer ce dogme : nous vivons dans un monde fini, aux ressources limitées. L’accord UE-Mercosur est un fantôme du monde d’avant l’accord de Paris sur le climat de 2015. C’est un bon accord pour les multinationales, des deux côtés de l’océan (agroalimentaire argentin et brésilien, automobile, machines-outils, chimie, pharmacie européenne), au détriment des petites et moyennes entreprises et des paysans dans le Mercosur et au sein de l’UE.
Il vous reste 61.38% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

