Le Proche-Orient, grand pourvoyeur en tournants historiques, vient de nous en offrir un de plus : pour la première fois, dans la nuit de samedi 13 au dimanche 14 avril, Téhéran a dérogé à sa politique de faire la guerre à Israël par milices interposées et a lancé un assaut de son propre territoire. Mais la « Promesse honnête », tel est le nom de l’opération, a piteusement échoué. La quasi-totalité des quelque 350 projectiles de tout genre et de tout calibre –missiles de croisière, missiles balistiques, drones – a été interceptée avant d’atteindre le territoire israélien. Quatre seulement sont passés à travers le réseau dense de la défense antiaérienne et ont causé des dommages mineurs à la base de Nevatim, dans le sud du pays, qui abrite les appareils F-35 de l’armée de l’air. Une petite fille bédouine a été blessée par un éclat. Et c’est tout.

Ainsi, sur le plan militaire, si les renseignements ont derechef failli à prévoir correctement la réaction de l’adversaire – en l’occurrence, les risques encourus après l’assassinat, le 1er avril, à Damas, du général des gardiens de la révolution, Mohammad Reza Zahedi, et de six de ses officiers –, Tsahal a tout de même montré de quoi il était capable et réussi à restaurer sa force de dissuasion.

Dans l’immédiat, l’administration américaine comme les gouvernements britannique et français essaient d’empêcher Israël de riposter à l’agression iranienne ou, du moins, de riposter de manière irréfléchie. Dans un tel scénario, en effet, le Hezbollah pourrait venir à la rescousse de son patron iranien, ce qui, de proche en proche, risquerait de provoquer une guerre régionale d’ampleur.

Pression américaine

Un développement de cette nature aurait des répercussions catastrophiques du point de vue américain. La Russie, déjà l’un des grands bénéficiaires de la guerre de Gaza, laquelle a détourné l’attention – et les ressources – de l’Occident de sa propre guerre en Ukraine, profiterait grandement d’un conflit généralisé au Proche-Orient. Mieux, les chances de réélection de Joe Biden en novembre en seraient affectées ; quel formidable cadeau pour Vladimir Poutine que l’accession à la présidence de Donald Trump !

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Bref, il serait préférable qu’Israël s’abstienne de réagir. Les Iraniens eux-mêmes ont affirmé publiquement qu’ils considéraient l’incident clos. Les Israéliens ont prouvé que leurs capacités sécuritaires étaient intactes et leurs alliances, solides. Une opération de plus n’ajouterait rien à leur dissuasion, sinon à la gloire de leur armée. Il est pourtant probable que, pour des raisons surtout politiques, ils estimeront qu’ils ne pourront pas ne rien faire.

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