La justice administrative a ordonné à la mairie de Nantes le décrochage d’un drapeau breton, qui était installé sur sa façade.
Une décision qui suscite chez certains de l’agacement, en particulier car les drapeaux de l’UE ou de l’Ukraine sont régulièrement présents sur les frontons des mairies.
TF1info revient sur les règles à respecter par les municipalités.

Suivez la couverture complète

L’info passée au crible des Vérificateurs

Le tribunal administratif de Nantes a ordonné en ce début de semaine à la mairie de Nantes de retirer un drapeau breton, accroché depuis 2021 sur son fronton. La socialiste Johanna Rolland, à la tête de la municipalité, défendait un « acte symbolique », ainsi qu’une « invitation à aller plus loin pour faire vivre la langue et la culture bretonne ». Prenant acte de la décision de justice, la ville a toutefois expliqué (nouvelle fenêtre) qu’elle allait respecter l’injonction de retirer le « Gwenn ha Du » de l’hôtel de ville.

En réaction aux articles qui évoquent ce jugement, des internautes affichent un agacement palpable. Certains s’émeuvent que le drapeau breton soit ainsi visé, tandis que l’on retrouve sur de multiples façades de mairies les couleurs de l’UE ou de l’Ukraine. 

Le drapeau breton n’est pas systématiquement proscrit

L’ornement par des drapeaux, que l’on nomme aussi le « pavoisement », répond à des règles assez spécifiques lorsqu’il s’agit de bâtiments publics. Avant toute chose, il convient de souligner que la décision du tribunal administratif de Nantes n’a pas été motivée par le motif du drapeau breton. La juridiction a mis en avant le fait que son installation à Nantes « n’a été précédée d’aucune délibération du conseil municipal ». Dès lors, elle doit être « regardée comme ayant été prise par la maire » en personne.

Sur le papier, rien n’interdit à une municipalité d’arborer les couleurs de sa région sur le fronton de l’hôtel de ville, comme le confirme à TF1info le professeur en droit public Jean-Paul Markus. Par ailleurs représentant du média Les Surligneurs (nouvelle fenêtre), il note qu’une mairie « ne peut pas être utilisée pour une prise de position », en vertu d’un « principe de neutralité des services et des bâtiments publics ». De même, il est défendu (nouvelle fenêtre) d’apposer des signes religieux, eu égard à l’article 28 de la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État.

Le drapeau européen est autorisé, confie le spécialiste, « tout comme celui de la région dont fait partie la commune ou la ville ». Les armoiries d’une municipalité peuvent par ailleurs tout à fait figurer sur un drapeau ornant la mairie. Du côté de Nantes, il n’est pas exclu que le drapeau breton flotte à l’avenir. Son rétablissement sera en effet inscrit à l’agenda du conseil municipal d’ici la fin de l’année. En cas de nouvelle saisine, la justice administrative devra déterminer si l’affichage de ce drapeau – qui représente une région à laquelle Nantes n’appartient plus depuis de longues décennies – est conforme à la législation. Dans ce cadre, le lien historique étroit entre la Bretagne et les Pays de la Loire pourrait notamment être plaidé par la municipalité.

En ce qui concerne les drapeaux d’autres pays, des principes spécifiques s’appliquent. « L’idée générale, c’est qu’une collectivité ne peut pas s’immiscer dans la politique étrangère », explique Jean-Paul Markus. Il est ainsi d’usage que les couleurs d’un État soient hissées en cas de visite officielle d’un dirigeant étranger, ou bien en lien « avec des causes qui ne sont pas contestées au niveau national ». C’est dans ce cadre que le drapeau bleu et jaune de l’Ukraine est souvent mis en avant. Des drapeaux commémoratifs peuvent également être arborés ponctuellement : ce fut le cas par le passé, « à l’occasion du Téléthon ou pour défendre la lutte contre discriminations visant les communautés LGBT+ », précise le spécialiste.

Enfin, une notion de temps est censée être prise en compte lorsqu’un drapeau étranger est mis en avant sur une mairie. Si les couleurs des États-Unis avaient été hissées sur des hôtels de ville après les attentats du 11 septembre, la bannière étoilée n’avait pas vocation à demeurer ad vitam æternam sur ces bâtiments publics et en fut ôtée au fil du temps. Plus récemment, la justice a été saisie à Nice, où le drapeau d’Israël est mis en avant à l’initiative du maire Christian Estrosi. Ce dernier a fait savoir qu’il flottera dans le ciel lorsque « tous les otages israéliens seront libérés », et l’on note que la juridiction administrative n’a – pour le moment – pas exigé (nouvelle fenêtre) un retrait.  

Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N’hésitez pas à nous écrire à l’adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur Twitter : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.


Thomas DESZPOT

Partager
Exit mobile version