Une nouvelle organisation humanitaire est priée de plier bagage au Niger. Le régime militaire au pouvoir a demandé au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de quitter le pays avec effet immédiat. Selon une source proche du dossier, le bureau de la délégation à Niamey a fermé, mardi 4 février. La junte de Niamey a « dénoncé les accords » avec le CICR, ajoute cet interlocuteur, et certains expatriés ont commencé à quitter le pays.

Le média nigérien Aïr Info a confirmé que le gouvernement nigérien avait ordonné, dans une note verbale, la fermeture des bureaux et le départ immédiat du personnel expatrié. Aucune raison n’a été dévoilée à ce stade pour cette décision.

Le régime militaire, arrivé au pouvoir en juillet 2023 par un putsch, a fait de la souveraineté nationale une de ses priorités. Il a notamment chassé les soldats français et américains engagés dans la lutte antijihadiste de son sol, expulsé l’ambassadeur français puis celui de l’Union européenne et s’est rapproché de nouveaux partenaires comme la Russie ou la Turquie.

« Missions de subversion »

Mais certaines organisations humanitaires sont aussi dans leur viseur. Fin janvier, le ministre de l’intérieur, le général Mohamed Toumba, avait affirmé prendre « d’importantes mesures pour assurer le suivi et l’encadrement des ONG et des organisations de développement ». « Nos enquêtes ont permis de découvrir qu’il y a beaucoup d’ONG qui sont en accointance avec ces partenaires qui nous portent la guerre, à travers des missions de subversion, (…) à travers des soutiens qu’ils apportent souvent aux terroristes », a-t-il précisé, expliquant prôner « la souveraineté ».

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En novembre, la junte avait retiré l’autorisation d’exercer à l’ONG française Acted et à l’association nigérienne Action pour le bien-être, sans préciser les motifs. Le Niger continue toutefois de recevoir l’aide d’organisations internationales comme le Fonds monétaire international, qui a conclu en novembre un accord avec Niamey pour le décaissement de 43 millions de dollars.

Le CICR était présent au Niger depuis 1990. Ces dernières années, il venait en aide aux personnes touchées par les violences djihadistes qui frappent le pays, dans la zone du Liptako-Gourma (sud-ouest) et du bassin du lac Tchad (est). Le Niger est confronté depuis une dizaine d’années aux attaques de groupes affiliés à l’Etat islamique et Al-Qaida.

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Lundi, dix soldats ont été tués dans la région de Tillabéri, l’épicentre des violences djihadistes, lors d’une « embuscade », selon l’armée. Deux opérations d’envergure de l’armée y sont déployées. Elle est également le lieu de passage de milliers de camions de fret du Niger arrivant chaque mois du port de Lomé, au Togo, via le nord du Burkina, sous escorte des armées des deux voisins. Début décembre 2024, 21 civils qui rentraient d’une foire hebdomadaire à bord d’un véhicule ont été froidement assassinés par des djihadistes présumés sur cet axe routier.

Avec ses deux voisins, le Burkina Faso et le Mali, eux aussi confrontés aux mêmes violences et gouvernés par des juntes, le Niger a annoncé la création prochaine d’une force commune de 5 000 hommes. Les trois pays, qui ont formé une confédération, l’Alliance des Etats du Sahel, ont quitté fin janvier la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest.

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Le Monde avec AFP

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