Un rappel ne fait jamais de mal : en France comme dans tant d’autres pays développés, des pans entiers de l’économie (BTP, hôtellerie-restauration, nettoyage…) tiennent grâce aux travailleurs étrangers, moins rémunérés que les travailleurs locaux.

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Fruit d’années d’enquête, Le Travail migrant, l’autre délocalisation (La Dispute, 2024) propose un panorama d’une délocalisation de l’emploi qui a cours tous les jours sur notre propre territoire. Le sociologue Daniel Veron, maître de conférences à l’université de Caen, dresse une histoire et une géographie d’une « appropriation du travail et des corps migrants » par « le capital », qui « tire profit d’une situation de vulnérabilité ».

Le « huis clos du travail »

Outre une mise en contexte des évolutions des modes d’appropriation du travail migrant, qui se répartissent principalement en deux catégories – le travail illégal, celui des sans-papiers, et le travail détaché, sous-traitance internationale qui se développe à la fin du XXe siècle –, l’auteur s’attache à raconter les parcours des travailleurs qu’il a rencontrés pendant près de dix ans : migrants boliviens et sénégalais sans papiers à Buenos Aires, mexicains à Montréal, salariés détachés dans le BTP ou les chantiers navals français… Souvent affectés par l’épreuve de l’exil, tous font face au « huis clos du travail » dans leur pays d’accueil : réduits à leur simple force de travail, ils peuvent difficilement faire valoir leurs droits, et acceptent ainsi des conditions de travail dégradées.

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Par cette situation déséquilibrée, « le travail migrant est en première ligne des stratégies contemporaines du capital pour fissurer les institutions salariales, s’inquiète le sociologue. Travail intérimaire, temps partiel subi, ubérisation, emploi intermédié, sous-traitance en cascade, déterritorialisation de l’emploi, limitation des droits syndicaux, facilitation du licenciement : le travail migrant est systématiquement au cœur des formes de précarisation des mondes du travail ».

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