Alors que l’Assemblée nationale s’apprête à débattre d’une nouvelle définition légale du viol, un détail sémantique d’apparence anodine s’avère en réalité décisif. La proposition actuelle définit le viol comme une « pénétration non consentie ». Nous demandons qu’elle soit remplacée par une définition plus juste et juridiquement efficace : « Le viol est une pénétration imposée. »

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Pourquoi ce changement est-il crucial ? Parce qu’il recentre la loi sur la réalité du crime et sur son auteur. Le viol n’est pas un problème de consentement flou, soumis à des interprétations douteuses, mais un acte de domination, une violence imposée. En l’état actuel, la formulation proposée place le projecteur sur la victime et son consentement – ou son absence de consentement – plutôt que sur l’acte commis par l’agresseur.

Dans les tribunaux, cela a des conséquences dramatiques. Aujourd’hui déjà, des victimes doivent prouver qu’elles ont résisté, qu’elles ont dit non avec suffisamment de force, qu’elles ne se sont pas laissé faire. Le consentement devient une arme retournée contre elles.

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L’agresseur, lui, peut se contenter d’affirmer qu’il n’a pas compris, qu’il pensait que c’était « ambigu ». Une défense qui fonctionne trop souvent et qui permet à des violeurs d’échapper à la justice. Si la charge de la preuve reste la même, les victimes seront toujours, demain, obligées de prouver qu’elles n’ont pas consenti et qu’il en était conscient.

Mettre fin à une logique perverse

Or, ce qui fait un viol, ce n’est pas l’absence d’un « oui » foncièrement enthousiaste, ce n’est pas la subjectivité de la victime (et comment le prouver ?), c’est la présence d’une contrainte, d’une menace, d’un abus de pouvoir ou d’une ruse pour parvenir à imposer l’acte sexuel. C’est cela, la stratégie de l’agresseur. C’est cela qu’il faut regarder, ce sont ces preuves-là qu’il faut chercher, c’est cela qu’il faut graver dans le droit. Cette conviction profonde vient de nos quarante années passées auprès des victimes de viols et de violences sexuelles.

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