
Le 22 février, lors de la cérémonie de clôture de la Berlinale, haut lieu de l’auteurisme, Lucile Hadzihalilovic recevait, des mains de Todd Haynes, un Ours d’argent, prix collectif de la meilleure contribution artistique, pour La Tour de glace, son quatrième long-métrage, en salle le 17 septembre. Sacre tardif pour la réalisatrice née en 1961 qui porte, depuis vingt ans, et à bout de bras, un univers fort, dérangeant, inclassable, construit au compte-gouttes ? Plutôt le signe que quelque chose est en train de bouger dans le cinéma d’auteur : des dogmes tombent et la tectonique des goûts se recompose. Désormais, une place redevient possible pour ce cinéma de l’imaginaire dont la cinéaste fut l’une des voix les plus solitaires, les plus tenaces aussi.
« Je représente un cinéma qu’il a toujours été difficile de défendre en France, reconnaît la réalisatrice. Ici, on privilégie les sujets jugés “nobles”, le social, le politique. Mais le cinéma n’est pas un tract. Je crois à un cinéma qui invente des formes et des mondes, pas à un cinéma qui illustre des slogans. » Formée à l’Idhec (aujourd’hui la Fémis) à la fin des années 1980, Lucile Hadzihalilovic s’y éprouve déjà « en décalage » dans sa promotion, aux côtés de Laurent Cantet (1961-2024), Robin Campillo ou Dominik Moll qui suivront la voie réaliste. Raison pour laquelle elle cofondera en 1991 avec son partenaire, Gaspar Noé, autre cinéaste de l’extrême, une société, Les Cinémas de la zone, vouée à produire leurs films différents.
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