
Soudain, « l’homme au sourire si doux », selon le mot de l’écrivain Daniel Rondeau, a fendu la mine joviale et sans âge qui d’ordinaire lui tient lieu d’armure. Jeudi 4 décembre, sous la coupole de l’Académie française, à Paris, l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a montré un visage qu’on ne lui connaissait pas, empreint d’une gravité solide, bouleversée, étrangement enfantine. Aux côtés de son épouse, Naziha, et de son éditeur Antoine Gallimard, qui l’applaudissait comme un frère, le romancier a reçu le Prix mondial Cino Del Duca. Fondé en 1969 par Simone Del Duca afin d’honorer la mémoire de son mari, le patron de presse, éditeur et mécène Cino Del Duca, ce prix a pour vocation de célébrer une œuvre qui porte « un message d’humanisme moderne ».
Après Germaine Tillion, Yves Bonnefoy, Mona Ozouf ou encore Yasmina Reza, cette distinction littéraire, l’une des plus prestigieuses à l’échelle internationale, récompense donc à nouveau un auteur français. Une remise symbolique avait déjà été organisée, au même endroit, le 18 juin, alors que Boualem Sansal était encore détenu en Algérie. Saluant sa récente libération, le président du jury et secrétaire perpétuel de l’Académie française, Amin Maalouf, a confié : « La phrase qui m’est venue spontanément aux lèvres, quand j’ai appris la bonne nouvelle, c’est celle de Pedro Calderon : “Le pire n’est pas toujours certain.” » Avant de poursuivre : « Parfois les écrivains, après les pires épreuves, conçoivent leurs plus beaux livres. C’est de cette manière qu’ils transcendent leurs souffrances, et leur donnent un sens. Cet ouvrage à venir, qui est peut-être déjà en chantier, aura, dans cette enceinte, ses plus fervents lecteurs. »
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