Livre. Ne lui dites pas qu’il a été le « patron » de la CGT. Philippe Martinez, qui, en couverture de son livre témoignage, Mon tour de Gaule, écrit avec Martin Veber (Plon, 272 pages, 20 euros), se frise la moustache, comme un clin d’œil au lecteur, récuse ce terme. Pour celui qui a été secrétaire général de la CGT du 3 février 2015 au 31 mars 2023, le dirigeant syndical « n’a pas vocation à être un patron, notre syndicat ayant pour principe fondamental le fédéralisme ». Il n’est que « le porte-parole de la centrale ».
N’attendez pas de lui qu’il s’appesantisse sur les conditions controversées de son élection, où il avait été soupçonné de tricherie – tout juste concède-t-il que la CGT « traversait une crise très importante » après la démission de son prédécesseur, Thierry Lepaon – ou sur les circonstances de son départ au congrès de Clermont-Ferrand, où il subit un double camouflet avec le rejet inédit de son rapport d’activité et la mise à l’écart de sa « dauphine », Marie Buisson, au profit de Sophie Binet, dont il bouda l’élection.
Le livre de M. Martinez, bien écrit, très vivant, n’est pas un mea culpa ou une confession. Il passe sous silence le fait que, sous son mandat, la CGT a perdu sa place de premier syndicat au profit de la CFDT. Il explique que sa centrale « n’est présente que dans moins de la moitié des entreprises ». Et il préconise, outre la désignation des représentants syndicaux dans les entreprises, « un vote national » pour élire les syndicats représentatifs. Fils d’immigrés espagnols – il conte avec émotion l’histoire de sa famille –, il affiche, dès les premières pages, son amour de la France, « référence en matière de progrès social » dans le monde, se sentant « totalement français et gaulois ».
Lutte contre les fermetures d’entreprises
A la tête de la CGT, M. Martinez a noué d’excellentes relations personnelles avec son homologue de la CFDT, Laurent Berger, tout en s’appuyant sur son aile radicale, mais l’ancien technicien de Renault proclamait que « le syndicalisme est, par essence, réformiste ». Il raconte avec humour ses échanges sans concession avec Emmanuel Macron, qui, dès leur premier entretien, lui demande (en vain) de l’appeler par son prénom, puis le reçoit avec son chien… En mai 2022, M. Martinez a appelé à voter contre Marine Le Pen. Le président lui envoie un SMS pour remercier « Philippe ». Réponse du syndicaliste, qui n’a cessé de combattre la politique et « l’attitude rigide » de ce « prince du court terme » : « N’oubliez pas d’être humble si vous l’emportez. »
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