Au lendemain du premier tour des élections législatives en France, qui a vu le Rassemblement national (RN) arriver en tête, la presse financière a fait ses gros titres sur le soulagement des marchés financiers. Alors qu’à la veille du scrutin, la Bourse de Paris terminait sur sa pire performance mensuelle en deux ans, dès lundi matin, le CAC 40 reprenait des couleurs, comparé aux autres indices boursiers européens. Les valeurs les plus « domestiques », comme BNP Paribas ou Vinci, rebondissaient après les attaques qui avaient suivi l’annonce de la dissolution, et l’écart entre les taux des emprunts souverains de la France et de l’Allemagne se resserrait, alors qu’il n’avait cessé de se creuser durant la campagne.

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La plupart des commentateurs, dont ceux de Bloomberg, leader de l’information financière, donnaient à lire que les investisseurs s’attendaient à un score plus important du RN et qu’ils voyaient reculer la perspective qu’il obtienne une majorité absolue au second tour. Curieuse lecture d’un score inédit (33,2 % des suffrages avec ses alliés LR, près du double de celui des législatives de 2022) et étrange confiance, alors même que rien, à ce stade, ne permettait d’écarter le scénario d’une majorité absolue.

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Il n’est pas interdit de penser que les marchés craignaient bien plus une percée du Nouveau Front populaire (NFP), dont le programme de rétablissement des services publics et d’investissement dans la transition écologique repose sur des hausses d’impôts et davantage de réglementation, que celle du RN, qui n’a pas manqué d’inscrire la « paix fiscale » dans ses éléments de langage. Les acteurs des marchés financiers ont tendance à voir dans l’action fiscale et réglementaire un risque d’incertitude et de manque à gagner, et sont, à l’inverse, rassurés par les offres politiques qui leur garantissent le business as usual. Leur soulagement a donc vraisemblablement plus à voir avec la distance qui sépare le score du RN de celui du NFP qu’avec l’absence de raz de marée du RN aux législatives.

Que d’ingratitude !

En miroir, il faut se rappeler le vent de panique financière qu’avait enclenché l’élection de François Mitterrand le 10 mai 1981. La cotation des entreprises dans le viseur des nationalisations avait dû être suspendue, car leurs actionnaires voulaient se débarrasser de leurs titres de peur qu’ils ne valent plus rien. La Bourse de Paris, qui opérait encore à la criée autour de la corbeille du Palais Brongniart, avait vu partir en fumée 40 milliards de francs de capitalisation en l’espace de trois séances et perdu près du quart de sa valeur en une semaine. En un mois, les actions françaises avaient chuté de 30 %. Le franc avait été attaqué sur le marché des changes, la Banque de France et la banque centrale ouest-allemande étaient intervenues pour éviter une crise du système monétaire européen.

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