Des bâteaux de pêche à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), le 5 mars 2014.

L’Union européenne (UE) s’est fixée pour objectif de protéger 30 % de ses eaux d’ici à 2030, dont un tiers strictement. Elle l’a officiellement inscrit dans sa stratégie en faveur de la biodiversité en 2020. Mais protéger quoi ? Uniquement telles ou telles espèces de poissons, des oiseaux marins, des fonds fragiles, ou bien un écosystème dans son intégralité ? Si l’UE a précisé que cette décision excluait la pêche industrielle dans la totalité de ces aires marines protégées (AMP), et même toute forme de pêche dans le tiers d’entre elles le plus étroitement surveillé, elle en est très loin aujourd’hui.

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Selon l’étude que l’association Bloom publie mardi 26 mars, en 2023, le chalutage soit de fond soit pélagique (qui vise de petits poissons en pleine eau) a cours dans 63 % de la surface des AMP européennes. Il y est même plus intense qu’à l’extérieur de ces zones. L’Espagne, la France et l’Italie arrivent en tête des Etats membres où le chalutage est le plus important et concentrent à elles trois 69 % de l’effort de pêche dans les AMP. Bloom observe que sur 6,2 millions d’heures de ce type de pêche dans les eaux européennes, 1,6 million ont lieu dans une AMP, soit environ un quart. Elle en déduit l’absence de protection contre cette technique de pêche dans cette partie du monde.

Bloom ne livre pas de clés pour comprendre pourquoi ces zones attirent autant les pêcheurs au chalut. Parce qu’elles ont été créées sur des zones poissonneuses à préserver ? Ou parce que leur protection les rend plus poissonneuses ? « Trop de facteurs entrent en jeu », répond Raphaël Seguin, doctorant en écologie marine, l’un des coauteurs. Les règles de protection à l’œuvre dans les AMP, aux statuts très divers, sont en effet variables.

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Un exercice statistique qui a ses limites

Quoi qu’il en soit, la montée en puissance de la plate-forme Global Fishing Watch a changé le travail des ONG mobilisées depuis longtemps sur la défense de l’environnement marin et augmenté leur capacité d’analyse de ce qu’il se passe en mer, loin des regards. Bloom y a eu recours pour cette étude. Elle a ainsi croisé 6 millions d’observations satellitaires avec les données cartographiques du Programme des Nations unies pour l’environnement, qui a répertorié près de 6 800 aires protégées en Europe.

Ce travail concerne uniquement les navires de plus de 15 mètres, tenus de se doter d’un système d’identification automatique (AIS) et de le laisser allumé. Il a permis au passage de repérer quelques navires usines de plus de 80 mètres de long, dont l’Annelies-Ilena, dans lequel la compagnie des pêches de Saint-Malo a récemment investi. Le Scombrus et le Joseph Roty II se distinguent, avec plus de 250 heures passées à opérer dans une AMP.

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