Des millions d’albums vendus. Quatorze Grammy Awards. Désignée personnalité de l’année par l’hebdomadaire Time en 2023. Une tournée mondiale dans vingt pays. Des admirateurs qualifiés d’après son propre nom, les « Swifties ». Il est impossible d’échapper à Taylor Swift.

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Après les retombées économiques faramineuses de ses concerts, c’est maintenant son rôle politique qui anime les discussions. Elle pourrait entraîner son public si elle dévoilait son vote à la présidentielle de novembre. La star de la chanson ne s’est pas encore prononcée à propos de ce scrutin, mais elle a déjà appuyé publiquement le Parti démocrate en 2018 et Joe Biden lors de l’élection de 2020. Cette position apparaît toujours paradoxale pour une artiste dont la carrière a débuté dans la country.

Aujourd’hui star de la pop, elle a commencé à se détacher du monde de la country avec son album Red en 2012 et en est sortie avec 1989, deux ans plus tard. Elle reste pourtant liée à ce genre. Sa jeunesse passée à Nashville, la Mecque de la country, et sa trajectoire jusqu’à New York sont ainsi devenues le fil narratif de son ascension nationale et mondiale. Si les positions politiques de Taylor Swift détonnent – la droite l’accuse de traîtrise –, c’est parce que son silence politique jusqu’en 2018 et son ancrage dans la country invitaient plutôt la droite à la rapprocher du conservatisme historique de ce genre musical.

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Lorsqu’elle inonde le marché de la musique aux Etats-Unis dans les années 1920, la country est d’emblée décrite comme une musique de la population blanche et rurale du Sud. Jusqu’à aujourd’hui, cela a en effet encouragé les conservateurs à la mobiliser pour rallier le vote blanc, comme l’a fait le gouverneur ségrégationniste d’Alabama, George Wallace, dans les années 1960 et 1970. Cette exploitation politique de la country explique pourquoi on associe souvent les artistes et leur public au conservatisme et au nationalisme.

Il faut savoir qui écoute Taylor Swift

C’est pourquoi il apparaît contradictoire que Taylor Swift soutienne Joe Biden et porte un discours de défense des droits des minorités raciales et sexuelles et de protection du droit à l’avortement. La country est pourtant agitée des mêmes courants qui traversent la société américaine. Si elle a son lot d’artistes se réclamant du conservatisme, des musiciennes de la même génération que Taylor Swift revendiquent des positions semblables sur les droits des femmes et des minorités.

Depuis les années 1990, lorsque l’industrie de la country commence à viser un public plus divers et national, il est néanmoins d’usage pour les musiciens et musiciennes de country ayant une très large audience de ne pas se prononcer pour le Parti républicain ou le Parti démocrate. Des artistes célébrissimes comme Dolly Parton avancent ainsi des opinions contre le racisme ou encore l’homophobie, mais ne prennent cependant pas parti pour ne pas s’aliéner une part fidèle de leur public.

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