La ministre du travail, Catherine Vautrin, et la présidente de la commission spéciale, Agnès Firmin Le Bodo, le 22 avril à l’Assemblée.

A l’ouverture des travaux de la commission spéciale de l’Assemblée nationale, lundi 22 avril, sur le projet de loi « fin de vie », la ministre de la santé, Catherine Vautrin, a appelé les députés à avoir un débat parlementaire qui se déroule dans « un esprit d’humanité, d’écoute et de respect ».

Après avoir évoqué « une certaine impatience dans notre société d’avoir » ces discussions, la ministre de la santé a mis en avant la volonté, avec ce texte, de « répondre aux souffrances insupportables de quelques personnes auxquelles la loi en vigueur n’apporte pas de réponses suffisantes » mais aussi la « recherche d’équilibre ».

Au cœur des questionnements, le fait de proposer à certains patients le moyen de se suicider et, quand ils sont incapables d’accomplir le geste fatal, de le faire pour eux. Cette « aide à mourir » sera réservée aux patients majeurs, nés en France ou résidant de longue date dans le pays, et en mesure d’exprimer clairement leur volonté. Le texte exclut explicitement les maladies psychiatriques. Il faudra également ressentir des souffrances intolérables et impossibles à traiter, physiques ou psychologiques. Enfin, le pronostic vital devra être engagé à court ou moyen terme.

« J’ai entendu des craintes auxquelles je souhaite que nous puissions répondre point par point, une forte exigence de clarté et de précision, une attente de vigilance au regard de la sensibilité du sujet », a assuré Mme Vautrin. Après avoir insisté sur le plan de développement des soins palliatifs, avec 1,1 milliard d’euros en plus d’ici 2034 et diverses mesures, Catherine Vautrin a cherché une nouvelle fois à rassurer sur la possibilité d’une aide à mourir. Le projet de loi précise notamment que « le médecin qui accepte d’examiner cette demande doit proposer une prise en charge en soins palliatifs si la personne malade n’en bénéficie pas déjà ». La personne a un délai de réflexion de « deux jours minimum », « sans délai maximal », pour confirmer son souhait d’une « aide à mourir ».

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Ce n’est « pas un copié-collé de législations étrangères, pas non plus un modèle euthanasique (…), pas non plus une autorisation de se suicider », « pas un droit nouveau ni une liberté nouvelle mais un chemin possible », avec des « conditions strictes », qu’elle a rappelées, comme autant « de garanties protectrices des personnes concernées et des soignants », a-t-elle insisté. Et « personne n’imposera à qui que ce soit l’aide à mourir », a assuré la ministre, précisant que le Conseil d’Etat avait noté « la clarté et la précision de ces conditions, par ailleurs proches de celles de certains pays européens ».

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Débat dans l’hémicycle à partir du 27 mai

L’audition de Mme Vautrin lundi par les 71 membres de la commission spéciale constituée pour l’examen de ce projet de loi donne le coup d’envoi de leurs travaux qui les amènera ensuite à auditionner des représentants du corps médical mardi, des cultes mercredi, d’associations jeudi, ou encore des psychologues, philosophes, sociologues, anciens ministres et parlementaires comme Alain Claeys et Jean Leonetti, auteurs de la dernière grande loi sur la fin de vie. Puis, à partir du 13 mai, la commission commencera à étudier les 21 articles du texte et les amendements déposés, avant que le texte ne soit examiné dans l’hémicycle à partir du 27 mai.

La présidente de la commission spéciale, Agnès Firmin Le Bodo (Horizons), qui a beaucoup œuvré pour le projet pendant son passage au gouvernement, a jugé que ce sera « forcément une très belle séquence, et [que] nous aurons des débats à la hauteur de l’enjeu », espère-t-elle alors que cette législature a été jusqu’ici marquée par des débats souvent très tendus.

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Espérant un débat empreint d’« humilité, de gravité et de respect de toutes les convictions », le rapporteur général Olivier Falorni (MoDem) a, lui, souhaité « une grande traversée parlementaire qui prenne tout le temps nécessaire », mais « pas de façon inconsidérée » car « beaucoup de Français attendent cette loi, notamment beaucoup de malades ». « Les députés ont conscience que ça sera très regardé et très suivi. Vous n’allez pas vous jeter dans une arène comme pour un PSG-OM », a métaphorisé en amont la députée « insoumise » Caroline Fiat, l’une des quatre corapporteurs thématiques de la loi. « On peut être en désaccord mais il faut faire attention aux mots qu’on prononce », a-t-elle glissé aux députés présents dans cette commission.

Le Monde avec AFP

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