L’enregistrement de la marque « Nicolas qui paie » auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi) par Erik Tegnér, fondateur du média d’extrême droite Frontières marque une nouvelle étape dans la récupération politique d’un simple mème.
Né d’un tweet ironique posté en 2020, « Nicolas qui paie » est devenu un étendard idéologique. Le Nicolas qui paie se veut être une victime du système, celui qui prend pour tout le monde, mais qui n’est jamais gagnant. Nicolas, c’est cette allégorie du « Français moyen méritant », censé trimer dur, payer des impôts et se voir continuellement dépossédé de ce qu’il mérite. Son dos, déjà courbé par les efforts pour gravir les échelons de l’ascenseur social, serait désormais brisé par les « charges » d’un système injuste, composé d’impôts, de prestations sociales et d’aides.
« Le plafond de verre est très dur à percer et je constate amèrement que la France s’éloigne de plus en plus d’une méritocratie », cingle un Nicolas interrogé par Le Figaro. Il ne s’agit plus d’humour ou de satire : ce discours, porté comme une vérité, diffuse l’idée que seuls certains Français seraient légitimes à se plaindre, à exister politiquement, à « payer pour les autres ».
Derrière le ton prétendument badin, Nicolas dresse une vision profondément biaisée et violente de notre société. Une vision dans laquelle les retraités, les chômeurs, les immigrés et les familles précaires seraient des fardeaux, des « dépenses publiques inutiles » à « tronçonner », selon les termes utilisés dans une publication Twitter. En clair : tout ce qui relève de la solidarité nationale devient suspect.
Ce personnage de Nicolas, qui se veut simple et représentatif, est en réalité un cheval de Troie. Il véhicule une idéologie réactionnaire, identitaire et néolibérale, selon laquelle seuls ceux qui produisent auraient le droit à la parole publique. Une vision de la France réduite à un « moi je » fiscal, où toute idée de service public ou de redistribution devient suspecte.
Il vous reste 64.12% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.