L’autrice canadienne Margaret Atwood l’a souvent confié : sa dystopie glaçante, La Servante écarlate, s’inspire de faits historiques. Concernant la mise sous tutelle financière des femmes, prémices de leur descente aux enfers, pas la peine de chercher bien loin.
Lorsque le roman paraît en 1985, cela fait vingt et un ans seulement que les Canadiennes ont le droit d’ouvrir un compte en banque sans l’accord de leur mari, soit un an avant la France qui fêtera, le 13 juillet, l’anniversaire doux-amer de cette émancipation : car, si depuis soixante ans, les Françaises peuvent librement ouvrir un compte, elles peinent toujours à conquérir leur indépendance financière.
Ce n’est pas faute d’y aspirer, comme le montre une étude réalisée par La France mutualiste (groupe Malakoff Humanis), en partenariat avec Bpifrance Le Lab, publiée lundi 7 juillet. Qu’est-ce qui, selon vous, contribue le plus à l’équilibre d’une femme aujourd’hui ? A cette question, en 1987, 52 % des femmes interrogées répondaient « des enfants, une famille », loin devant l’« indépendance financière » (25 %). En 2025, le rapport est inversé : l’indépendance financière (50 %) passe devant la famille (27 %).
« Aversion au risque »
Ce changement spectaculaire traduit aussi bien une prise de distance par rapport aux schémas sociétaux traditionnels qu’une angoisse économique. Même si l’écart se réduit, « le revenu salarial des femmes travaillant à titre principal dans le secteur privé restait, en 2023, inférieur de 22 % à celui des hommes », en raison d’un recours plus élevé au temps partiel et à des emplois moins qualifiés, souligne une note de blog de l’Insee. Divorce, famille monoparentale, retraite, les femmes basculent plus vite dans la précarité.
Un autre facteur moins connu ralentit le rattrapage financier : en matière d’épargne, les femmes montrent une « aversion au risque plus marquée » que les hommes, souligne Marie-Anne Barbat-Layani, la présidente de l’Autorité des marchés financiers (AMF), dans un texte paru au premier trimestre dans la Revue d’économie financière : « Le sous-investissement des femmes est massif, notamment dans les actions cotées, dont on sait pourtant que c’est l’investissement le plus rentable à long terme. »
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