Le président iranien, Ebrahim Raïssi, lors du défilé de la Journée de l’armée sur une base militaire située au nord de Téhéran, le 17 avril 2024.

Quand au petit matin du 14 avril, Nadine Olivieri Lozano, l’ambassadrice suisse en Iran, est convoquée par les autorités locales, ce ne sont pas ses homologues diplomates du ministère des affaires étrangères qu’elle rencontre. C’est vers un bureau des gardiens de la révolution, l’armée idéologique du régime, qu’on la dirige, racontait le 16 avril l’un des conseillers du ministère de l’intérieur, Mojtaba Abtahi. Quelques heures plus tôt, Téhéran avait déclenché l’opération « Promesse tenue » en tirant des centaines de projectiles contre Israël.

La Confédération suisse représente les intérêts des Etats-Unis en Iran, les deux pays n’entretenant pas de relations diplomatiques. Or ce 14 avril, les gardiens avaient un message à faire parvenir à Washington : « Ils ont dit [à l’ambassadrice suisse] que si les Américains faisaient le moindre geste, toute la région serait détruite », soutient Mojtaba Abtahi. La République islamique qui, quelques jours auparavant, avait déjà pressé les Etats-Unis de se tenir à l’écart d’un affrontement direct entre l’Iran et Israël, réitérait donc là ses menaces.

Tel que relaté par le conseiller du ministère de l’intérieur, ce déplacement nocturne de l’ambassadrice suisse chez les promoteurs de la ligne dure du régime iranien pourrait symboliser à lui seul la façon dont les gardiens de la révolution ont mis la main sur les affaires du pays. Un pouvoir que l’opération militaire « Promesse tenue », conduite par la branche aérospatiale de l’armée idéologique de la République islamique, éclaire à nouveau.

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Lancée aux premières heures du 14 avril en représailles à l’attaque par Israël de son consulat en Syrie, menée le 1er avril, et à la mort de l’un de ses généraux, l’attaque iranienne aura été plus importante qu’attendue, avec plus de 300 drones, missiles de croisière et missiles balistiques tirés vers Israël et destinés à provoquer des dégâts conséquents. Même si le gros des projectiles semble avoir ciblé des bases aériennes dans le désert du Néguev, éloignées des centres de populations, la majorité ayant été interceptée en vol par I’Etat hébreu, par les forces occidentales déployées en mer ou dans les Etats limitrophes, et même par les pays arabes sunnites dans le cas des drones.

Loin de faire preuve de retenue après la mort du général Mohammad Reza Zahedi, chef de la Force Al-Qods en Syrie et au Liban – la composante d’élite des gardiens de la révolution chargée des opérations à l’étranger –, comme le pays avait pu le faire par le passé, Téhéran a donc pris pour la première fois la décision stratégique d’attaquer Israël depuis son sol. « L’Iran ne pouvait pas se permettre qu’Israël pense qu’il n’y avait aucune limite à la décapitation des dirigeants de ses forces armées et des gardiens de la révolution », assure Ali Vaez, spécialiste de l’Iran au centre de réflexion International Crisis Group (ICG).

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