Depuis vingt ans, dans la plus grande indifférence, chaque étude consolide un constat sans appel : les personnes trans vivent un régime d’exclusion si total qu’il justifie le terme de ségrégation silencieuse. En 2020, l’Institut national d’études démographiques résumait ainsi : « Les personnes trans connaissent des expériences de violence omniprésentes, dans toutes les sphères de la vie. »
Les violences sont économiques. Discrimination à l’embauche, harcèlement, et mises au placard sont courantes : 28 % des personnes trans déclarent avoir perdu un emploi ou une opportunité professionnelle en raison de leur identité. L’ampleur de ce phénomène d’exclusion est probablement plus grande encore, puisque 19,5 % d’entre elles bénéficiaient du revenu de solidarité active (RSA) en 2015 contre 1,1 % pour la population générale.
Les violences sont physiques et sexuelles. D’après l’Agence européenne des droits fondamentaux (European Union Agency for Fundamental Rights, Fundamental Rights Agency, ou FRA), 44 % des femmes trans déclarent avoir été victimes de violences physiques, sexuelles ou de menaces sur les douze derniers mois. Dans leur parcours de vie, 30,7 % des femmes rapportent avoir subi les mêmes attaques. Cette disproportion est vertigineuse. Les femmes trans, qui sont presque tout le temps dépeintes dans le débat public comme des menaces, notamment par des courants rattachés à l’extrême droite à l’instar des « femellistes », font partie des populations les plus sujettes aux violences.
Les conséquences de cette situation sont graves. En 2015, près de 20% des personnes témoignant avoir été victimes d’actes transphobes déclaraient d’une incapacité temporaire de travail à la suite, et 18,3 % avaient tenté de se suicider. Pourtant, nos représentants politiques, habituellement obsédés par la question sécuritaire, ne disent rien de cette réalité.
Violences médiatiques
Les violences sont sociales. Les femmes trans sont 18,5 fois plus nombreuses que la moyenne à avoir connu le sans-abrisme, et les hommes trans 13 fois plus. Ce chiffre ne traduit pas seulement une précarité financière évidente, mais aussi une discrimination documentée des logeurs et l’effondrement des réseaux de solidarité. Ce fossé terrifiant ne choque cependant ni les médias, qui ne le couvrent pas, ni les politiques, qui ne s’en inquiètent pas.
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