C’est une intervention qui arrive à point nommé. Lors de son discours, qui a ouvert la Nuit du droit, jeudi 3 octobre, Laurent Fabius, le président du Conseil constitutionnel, a tenu à rappeler certains grands principes fondant les démocraties libérales et, en premier lieu, à revenir sur la notion d’« Etat de droit ».

Cela tombe bien : le thème de cette année est « la démocratie et le droit ». Surtout, cela permet de répondre – à distance et toujours dans ce style chirurgical qui caractérise Laurent Fabius – au nouveau ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau. Issu de l’aile la plus à droite des Républicains (LR), l’ancien sénateur de Vendée a évoqué l’éventualité d’une remise en cause de l’Etat de droit. Le 29 septembre, il estimait dans le Journal du dimanche (JDD) que « l’Etat de droit, ça n’est pas intangible, ni sacré ».

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Face au tollé, il a ensuite corrigé son propos par un communiqué publié le 1er octobre : « Bien sûr qu’il ne peut y avoir de démocratie sans Etat de droit, sans que la puissance publique ne respecte le droit et les libertés. C’est là le fondement de notre République. » Michel Barnier, le premier ministre, avait également dû faire une mise au point lors de sa déclaration de politique générale, le 2 octobre : « La fermeté de la politique pénale est indissociable du respect de l’Etat de droit, et dans les principes d’indépendance et d’impartialité de la justice auxquels je suis profondément, personnellement et définitivement attaché. » Mise au point insuffisante : jeudi, 170 parlementaires LR signaient une tribune publiée par Le Figaro en soutien à M. Retailleau et à sa conception de l’Etat de droit exprimée dans le JDD.

« Malaise démocratique »

Le président du Conseil constitutionnel rappelle, lui, l’importance de l’Etat de droit. « Nos démocraties ont besoin d’autorité, de sécurité et d’efficacité. Face aux attaques portées sur ces terrains, il importe de montrer concrètement qu’elles peuvent satisfaire ces exigences et le faire dans le respect de l’Etat de droit. L’Etat de droit est la condition de la démocratie et ne doit pas être confondu avec l’état du droit, qui, lui, bien sûr, peut être modifié », a ainsi détaillé l’ancien premier ministre socialiste devant ses invités, notamment l’ancien secrétaire d’Etat américain John Kerry, Ioulia Navalnaïa, la veuve de l’opposant russe Alexeï Navalny, ou encore Siofra O’Leary, ancienne présidente de la Cour européenne des droits de l’homme. Et de poursuivre : « Le constat critique de certains manques dans l’accomplissement de l’idéal démocratique ne doit pas mettre en cause cet idéal lui-même qui, justement, doit permettre de remédier à ces manques. »

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