La France s’apprête à reconnaître l’Etat de Palestine, lundi 22 septembre, à la tribune des Nations unies. Cette initiative, portée par Emmanuel Macron, ne peut qu’être approuvée. Elle a pour elle la cohérence et les principes. La France a toujours soutenu la solution des deux Etats, ligne d’horizon fixée dès le plan de partage de la Palestine mandataire voté en novembre 1947 sous les auspices de la toute jeune ONU.

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Ce soutien est conforme à un principe fondamental, le droit des peuples à l’autodétermination. Reconnaître l’Etat de Palestine, c’est reconnaître l’existence d’un peuple palestinien, ce que personne ne peut contester, et l’existence d’un territoire sur lequel son droit à l’autodétermination pourra s’exercer.

Ce territoire, composé de Gaza et de la Cisjordanie, a été conquis et colonisé par la force par Israël, et le caractère inacceptable d’une telle conquête est un autre principe fondamental du droit international qui ne doit souffrir aucune exception, sauf à assumer un double langage en fonction d’intérêts fluctuants. Cette reconnaissance implique une reconnaissance parallèle d’Israël par les pays qui s’y sont jusqu’à présent refusés et une acceptation définitive de l’Etat hébreu par les Palestiniens eux-mêmes, garantie indispensable de sa sécurité.

Les adversaires de la logique fondée sur ces principes de la reconnaissance de l’Etat de Palestine n’y opposent que des arguments d’opportunité. L’instant choisi ne serait pas propice, il vaudrait mieux la remettre à plus tard. Cette reconnaissance constituerait une victoire pour le Hamas, responsable des massacres du 7-Octobre, à l’origine du cycle de guerres qui a embrasé le Proche et le Moyen-Orient.

Le premier argument n’est recevable qu’à condition de détourner les yeux de ce qui se joue aujourd’hui à Gaza et en Cisjordanie. Cette escalade a convaincu Emmanuel Macron que la France ne pouvait plus attendre pour rejoindre l’écrasante majorité des pays membres des Nations unies. Ces derniers, faut-il le rappeler, considèrent depuis bien longtemps que reconnaître l’Etat de Palestine est un acte de justice, susceptible de mettre un terme à un conflit qui a engendré trop de désolation.

Appel au désarmement

La réalité est qu’Israël ne se contente pas d’assurer et de répéter par la voix de son premier ministre, Benyamin Nétanyahou, qu’il n’y aura jamais d’Etat palestinien. La réalité est qu’il met tout en œuvre pour l’empêcher, et qu’il est sur le point de triompher. La réalité est que la solution israélienne à la question palestinienne n’a jamais été aussi clairement exposée. Il s’agit de la destruction de Gaza pour pousser à l’exil le plus possible de ses habitants, ainsi que de déplacer et d’enfermer les Palestiniens de Cisjordanie dans l’équivalent des bantoustans de l’apartheid, soumis à une pression militaire, économique et humanitaire visant également à rendre inéluctable leur départ.

Le président français, Emmanuel Macron, lors d’une vidéoconférence avec plusieurs partenaires européens et arabes sur la situation au Moyen-Orient, à l’Élysée, le 15 septembre 2025.

Le second argument n’est pas plus convaincant. Nul ne peut à la fois stigmatiser à juste titre le Hamas parce qu’il dénie à Israël le droit d’exister, et assurer en même temps qu’il se féliciterait d’une initiative réaffirmant avec force la légitimité de l’Etat hébreu. Sans compter que l’initiative française s’accompagne d’un appel au désarmement et à la mise à l’écart définitive d’un mouvement discrédité par sa barbarie et son despotisme.

Cette reconnaissance de l’Etat de Palestine est un message adressé à deux peuples. Elle vise à tirer le plus fort, emmuré dans une histoire douloureuse, de l’illusion de la toute-puissance, et à entretenir une lueur d’espoir pour celui qui ne cesse de la subir, à Gaza comme en Cisjordanie. Les limites concrètes de cette initiative, face au jusqu’au-boutisme de Benyamin Nétanyahou soutenu aveuglément par Donald Trump, sont évidentes. Mais l’attentisme, aujourd’hui, vaut proclamation d’impuissance et, au fond, acquiescement à un projet assumé de nettoyage ethnique.

La France, enfin, n’est pas seule. Elle a réussi à fédérer les pays arabes, par qui passent l’intégration complète de l’Etat hébreu au Proche et au Moyen-Orient, et des partenaires occidentaux trop longtemps immobiles. Reconnaître l’Etat de Palestine ne suffira pas pour apporter la paix, bien évidemment. Y renoncer, en revanche, c’est hâter la destruction de la solution des deux Etats, soit la garantie d’une guerre sans fin.

Le Monde

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