- Jeudi, 3 agents de la Brav-M ont été condamnés pour des violences en marge d’une manifestation à Paris en 2023.
- Les peines prononcées incluent de la prison avec sursis, des amendes et des interdictions temporaires d’exercer.
- Le président du tribunal de Bobigny leur a rappelé qu’ils n’étaient pas « au-dessus des lois ».
Deux gifles assenées à un jeune interpellé assis dos au mur, à qui les policiers menacent de casser les jambes ou de venir le retrouver dans son quartier. Trois agents de la Brav-M ont été condamnés jeudi 10 juillet pour violences en marge d’une manifestation à Paris en 2023. Plus sévères que les réquisitions, les peines infligées par le tribunal correctionnel de Bobigny, jusqu’à un an de prison avec sursis, sont assorties d’interdictions temporaires d’exercer.
Les faits remontent au 20 mars 2023, une nuit durant laquelle Paris était le théâtre d’un cortège sauvage, en marge du mouvement de contestation contre la réforme des retraites. Ce soir-là, sept jeunes, soupçonnés d’avoir pris part à des dégradations, sont interpellés par une brigade de la répression de l’action violente motorisée (Brav-M).
Un enregistrement audio qui avait choqué
L’un d’eux lance alors discrètement un enregistrement des échanges avec les policiers. Le document audio – dont des extraits diffusés dans les médias trois jours après les faits avaient suscité un émoi jusqu’au préfet de police de Paris – a permis à la justice « d’apprécier individuellement, au cas par cas,
la responsabilité de chacun des fonctionnaires de police
«
, a précisé le président du tribunal Youssef Badr avant d’annoncer les condamnations.
Car dix agents de la brigade de répression de l’action violente motorisée (Brav-M) ont été jugés le mois dernier à Bobigny. Deux avaient été renvoyés devant la justice par le parquet et huit autres policiers de la brigade ont comparu devant le tribunal sur demande de Souleyman Adoum Souleyman et d’une autre étudiante, arrêtée dans le même coin de rue que lui à Paris, via le mécanisme de citation directe. Sept d’entre eux ont été relaxés jeudi.
Toi, je t’aurais bien pété les jambes
Toi, je t’aurais bien pété les jambes
Un des agents en cause
La peine la plus lourde a été prononcée contre le policier qui a, par deux fois, frappé le jeune Tchadien au visage alors que, souligne Youssef Badr, « M. Souleyman est déjà assis au sol lorsque les coups ont été portés (…) et il n’a jamais été insolent, ni désinvolte et encore moins insultant. »
Cet agent de la Brav-M a été condamné jeudi à un an de prison avec sursis, deux ans d’interdiction d’exercer la profession de policier et à une amende de 450 euros.
A l’issue de deux journées d’audience, le parquet n’avait requis contre lui qu’une peine de quatre mois de prison avec sursis et une interdiction d’exercer pendant un an. « Toi, je t’aurais bien pété les jambes (…). La prochaine fois qu’on vient, tu monteras pas dans le car pour aller au commissariat, tu vas monter dans un autre truc qu’on appelle ambulance pour aller à l’hôpital »
, avait lancé un agent à Souleyman Adoum Souleyman, l’étudiant qui a toujours nié avoir été un manifestant ce soir-là.
Vous n’êtes pas au-dessus des lois
Vous n’êtes pas au-dessus des lois
Youssef Badr
Le tribunal a condamné ce policier à huit mois de prison avec sursis, à une interdiction d’exercer pendant un an et à 450 euros d’amende. Ces propos « en aucun cas justifiés »,
a souligné le président Youssef Badr, constituent « une violence verbale capable de susciter un choc psychologique »
. Contre cet agent de la Brav-M, le parquet n’avait retenu qu’une peine contractuelle d’amende de 450 euros.
Pour avoir également tenu des menaces constituant des violences verbales, un troisième policier a été reconnu coupable et condamné à 2.000 euros d’amende. Aux hommes alignés devant lui, Youssef Badr a tenu à signaler que ces peines « sont juste là pour vous rappeler que vous n’êtes pas au-dessus des lois ».
Satisfait, Me Arié Alimi, conseil des deux étudiants s’étant constitués parties civiles, note que « les condamnations contre la Brav-M se multiplient »
. « Cette unité, continuité des voltigeurs qui ont tué Malik Oussekine en 1986, doit disparaître du maintien de l’ordre »
, a réagi l’avocat auprès de l’AFP.
En sortant de la salle d’audience, Me Chloé Saynac, représentant la Ligue des Droits de l’Homme, a estimé que « ce qui est important dans ces dossiers, c’est qu’il y ait des interdictions d’exercer »,
déplorant le sursis appliqué aux peines de prison, qui « restent donc relativement indolores ».