Investigations et recherches menées par la police dans le bois de Boulogne non loin de l'université Paris Dauphine-PSL, le 23 septembre 2024.

Après le meurtre de la jeune étudiante Philippine, des associations féministes et élus de gauche ont appelé jeudi 26 septembre à « penser ce crime » sous le prisme des féminicides et non de l’immigration. « La misogynie tue. Ne nous trompons pas de débat », a réagi sur X la Fédération nationale de centres d’information sur les droits des femmes et des familles.

Dire que « les femmes sont en danger à cause des immigrés, à cause des étrangers sous OQTF [obligation de quitter le territoire] », ce « n’est pas vrai », a déclaré la députée écologiste de Paris Sandrine Rousseau sur France Inter. « Les femmes sont en danger de mille et une manières dans notre pays sous la violence des hommes, de beaucoup d’hommes et des hommes de toutes couleurs et de toutes situations ». Elle a également condamné « cette espèce de fantasme du viol » qui serait commis « dans la rue par des personnes qui seraient étrangères ». « Là on a un cas, mais c’est minoritaire dans les violences que subissent les femmes », a-t-elle ajouté.

Cette prise de position, vilipendée par l’extrême droite, qui accuse la députée de « relativisme » sur les réseaux sociaux, tranche avec le débat politique surgi après la découverte du profil du principal suspect, un Marocain de 22 ans, condamné par le passé pour viol et sous le coup d’une OQTF.

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Plusieurs responsables politiques, de droite comme de gauche, ont mis en cause « la chaîne pénale et administrative » dans cette affaire, jugeant que le suspect n’aurait pas dû être libéré avant l’obtention du laissez-passer permettant son expulsion vers le Maroc. Le ministre LR de l’intérieur, Bruno Retailleau, a promis « de faire évoluer notre arsenal juridique » tandis qu’à l’extrême droite, Marine Le Pen a dénoncé un « laxisme devenu idéologie d’Etat ».

Une récupération « morbide » et « mensongère »

Un appel à manifester a été lancé par le collectif identitaire Nemesis, s’attirant en retour des accusations de récupération de la part de la gauche et d’associations féministes. « C’est quand même bizarre qu’on ne fasse pas le lien avec la masculinité » alors qu’on « est en plein procès Mazan » – une cinquantaine d’hommes accusés d’avoir violé Gisèle Pelicot alors qu’elle était inconsciente, droguée à son insu par son mari – , a déclaré la militante féministe Alice Coffin sur BFM-TV mercredi soir.

Dans les rangs de La France insoumise, la députée Sarah Legrain a estimé que l’enjeu soulevé par la mort de Philippine était avant tout « la lutte contre le viol et le féminicide ». « Sur ces sujets, où sont celles et ceux qui ne réagissent que sur certains viols et certains féminicides pour en faire des lectures racistes et servir leurs propositions anti-immigrés ? », s’est-elle interrogée sur X.

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Une récupération « morbide » et « mensongère » qui « occulte la question des violences faites aux femmes », estime de son côté Maëlle Noir, du collectif féministe #Noustoutes. « La mort de Philippine, c’est le 104e féminicide depuis le début de l’année. Je n’ai pas entendu la droite, l’extrême droite ni même le gouvernement sur les 103 autres féminicides qu’on compte, nous, tous les jours », déclare-t-elle à l’Agence France-Presse.

Ces questions doivent « être envisagées à travers la capacité de la société tout entière à prévenir les féminicides et la récidive, quelle que soit la nationalité des personnes condamnées », fait valoir le Syndicat de la magistrature, classé à gauche. Selon les dernières données de l’Observatoire des violences faites aux femmes, qui précise qu’il s’agit d’une estimation minimale, 217 000 femmes majeures ont été victimes de viols, tentatives de viol et/ou agressions sexuelles en France en 2021.

Le Monde avec AFP

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