En Afrique de l’Est, le Mozambique fait face à la montée des eaux et aux cyclones.
Ces 25 dernières années, la ville de Beira a été frappée à deux reprises, causant à chaque fois des centaines de morts et des dégâts considérables. Depuis, tout est fait pour réduire les risques, et les efforts portent leurs fruits.

Suivez la couverture complète

Le 20H

C’est une journée de pêche qui commence sur cette plage du Mozambique, rien de plus habituel. Si ce n’est que l’océan qui nourrit ces pêcheurs de Bera est aussi désormais celui qui les fait disparaître. Il suffit de prendre de la hauteur pour se rendre à l’évidence. Une bande de sable qui se rétrécit et qui a perdu 100 m en 20 ans, nous dit Joao : « Avant, mon entrepôt était là-bas, là où se trouve le bateau. Mais l’eau a beaucoup monté et ma cabane a été engloutie. En 10 ans, je l’ai déplacée plusieurs fois. La dernière était ici. Voilà les fondations. J’en ai donc reconstruit une nouvelle. C’est la cinquième. Mais à marée haute, elle est envahie par l’eau. » Et cette fois, il n’y a plus de place en retrait. Et c’est le problème auquel est confrontée cette ville portuaire du Mozambique. Plutôt flagrant lorsqu’on arrive en avion. 

À gauche, deux fleuves qui peuvent déborder. À droite, l’océan Indien qui monte. Et au milieu, une plaine, légèrement au-dessus du niveau de la mer. Une cuvette pour les 600.000 habitants. « Donc il suffit qu’il pleuve un petit peu pour que les maisons soient inondées. Parce que le terrain n’absorbe plus. Vous voyez, c’est mouillé. Il n’a pas plu depuis des jours. » Michel est français et vit à Beira depuis huit ans. Il a déjà connu trois cyclones, de nombreuses inondations. Et aide les organisations humanitaires qui travaillent ici. « Ces plantes, c’est le signe qu’il y a toujours de l’eau », montre-t-il à l’équipe de reportage du 20H de TF1 envoyée au Mozambique.

Une des 10 villes les plus impactées par le réchauffement climatique

Trois semaines pourtant qu’il n’a pas plu. Ce sont des algues. Il y en a partout. Jusque dans cette cour transformée en marécage. Où ce jeune homme vit avec sa mère : « On a été inondé trois fois. Et on a cette eau en permanence. Elle est devenue verte au fil du temps. On vit comme ça. On s’adapte. » Michel est rentré en France l’hiver dernier. Précisément quand les inondations dans le nord faisaient la Une de l’actualité. Et ce qui le frappe ici, c’est la capacité individuelle à s’adapter. « Regardez là par exemple. Ils ont mis des sacs pour faire une petite protection, une petite barrière. Ce sont des adaptations modestes. Et les gens continuent à vivre de cette façon-là », précise-t-il. 

Beira est l’une des dix villes au monde les plus impactées par les effets du réchauffement. Dans un pays qui a connu cinq cyclones en cinq ans dont Hidaï en 2019. Plus de 600 morts. Au total 700 millions d’euros de dégâts toujours visibles. Impossible à régler pour l’un des États les plus pauvres de la planète. Et c’est concrètement le défi de Peter, chef de projet chez VNG International. Trouver de l’argent pour reconstruire mieux. Et surtout adapter la ville aux effets du réchauffement. « Ça c’est le bon exemple d’un toit mieux reconstruit. Il y a un mur tout autour. Parce que le problème ici, c’est que le vent passe toujours en dessous. Et arrache tout. Avec cette protection, le vent ne peut plus s’engouffrer », explique-t-il. 

Peter est convaincu que cette ville peut s’adapter. Et pour cause, il est Hollandais. Un tiers de son pays vit en dessous du niveau de la mer grâce à un réseau de canaux. C’est le plan pour Beira. Et les premiers résultats sont là. « Tous ces canaux stockent et transportent l’eau. Les plus petits vers les plus larges. Et quand c’est marée basse, on ouvre les portes des écluses sur la mer », rapporte-t-il en montrant les constructions. Et quand c’est marée haute, l’eau est stockée ici dans des bassins de rétention. José, ingénieur a donc l’un des rôles les plus importants de la ville : « Je dois savoir précisément quand il va pleuvoir. Connaître la quantité de pluie et l’heure des marées. Parce que cette eau, je peux la garder temporairement. Avant de l’évacuer, grâce aux écluses, vers l’océan. » 

La seule difficulté ici par rapport à la Hollande, c’est qu’il y a une saison des pluies et de très grandes marées. Mais malgré cela, la situation dans le quartier s’améliore. Et les familles qui étaient parties reviennent. « C’est plus facile maintenant. On voit la différence quand il y a beaucoup d’eau. Parce qu’elle part dans le canal et va se déverser dans la bassine », confie une habitante. Tout l’enjeu est effectivement d’absorber l’eau. Et c’est pour cela que cet autre quartier de Beira, régulièrement inondé par la rivière, a été transformé en parc. Le plus grand parc urbain vert d’Afrique. Pour faire pénétrer l’eau dans le sol, l’homme n’a en effet rien trouvé de mieux que les racines des arbres, en l’occurrence des mangroves, nous explique Albano Carige, le Maire de Beira : « Je veux faire comprendre ici à tout le monde l’intérêt de cet arbre. Quand nous avons construit cette passerelle, nous avons interdit qu’il soit coupé. Pour que chaque personne qui le contourne réalise que cet arbre est forcément très important. » Et c’est la banque mondiale qui a en partie financé cette grosse éponge. Car aujourd’hui, la majeure partie de l’aide internationale versée pour le climat est investie dans les solutions dites fondées sur la nature. Et il suffit de regarder cette journée de pêche qui s’achève et de prendre encore plus de hauteur. Là où les hommes ont arraché la mangrove à droite pour s’installer, ils subissent l’érosion. Là où la mangrove n’a pas encore été coupée à gauche, l’eau est stockée, lentement absorbée. Et surtout, les poissons viennent s’y reproduire pour que ces pêcheurs puissent encore pêcher demain.


La rédaction de TF1 | Reportage Sylvie Pinatel, Stefan Iorgulescu, Cedric Aguilar

Partager
Exit mobile version