Vous pensez à un ami que vous n’avez pas vu depuis longtemps et voilà que son nom s’affiche sur votre téléphone.
Vous croisez souvent « 11h11 » ou « 22h22 », ou les suites de chiffres comme « 111 »… Ce phénomène s’appelle « les synchronicités ».
Théorisé par le psychanalyste suisse Carl Gustav Jung, il s’agit de « hasard qui n’en est pas un ».
Paul Éluard a dit « il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous« . Avec ces quelques mots, il évoque les synchronicités, terme inventé par le célèbre psychanalyste Carl Gustav Jung. Pour ce dernier, une synchronicité est « un hasard qui n’en est pas un« , comme recevoir un appel d’une personne à laquelle vous étiez en train de penser, entendre une chanson qui parle exactement de vos sentiments, voir le nom de votre crush partout où vous posez les yeux. Bref, il s’agit de coïncidences significatives.
Un signe de l’inconscient ?
Le psychanalyste écrit « j’entends par synchronicité les coïncidences, qui ne sont pas rares, d’états de fait subjectifs et objectifs qui ne peuvent être expliquées de façon causale, tout au moins à l’aide de nos moyens actuels« . Il estime que ces hasards n’en sont pas tout à fait. Pour illustrer cette notion, il prend l’exemple d’une de ses patientes. Cette dernière lui raconte un rêve dans lequel elle reçoit un scarabée (qui dans la mythologie égyptienne, représente la transformation). Au même moment, un bruit provoqué par un insecte se fait entendre. Jung le capture et constate qu’il s’agit d’un insecte proche de celui du rêve de la patiente et lui répond : « Le voilà, votre scarabée ! ». Les synchronicités seraient une réponse à un besoin conscient ou inconscient. Pour le psychologue clinicien, Richard Durastante, les « phénomènes de synchronicité ne peuvent être expliqués que par l’hypothèse de l’inconscient collectif et des archétypes. Ces derniers sont des images primordiales qui lient l’humanité« . Il ajoute dans son article « Les synchronicités : comment C.G. Jung a influencé la thérapie familiale psychanalytique (nouvelle fenêtre) » que « tout état affectif, émotionnel, provoquerait une modification de la conscience et un abaissement du niveau mental. La conscience perdrait de son acuité et l’inconscient se trouverait renforcé, ce qui pourrait donner lieu à une pénétration de l’inconscient individuel et collectif dans la conscience ».
Les nouvelles générations reprennent le concept de synchronicités
Avec l’engouement pour les spiritualités et l’ésotérisme, les adeptes de mysticisme remettent le concept de synchronicité au goût du jour. TikTok et Instagram pullulent de vidéos décryptant ces « clins d’œil de l’univers ». La Tiktokeuse Sandrine Gryson explique, par exemple, qu’il s’agit « d’une succession d’événements un peu magiques où tu sens que tout est guidé ». Elle ajoute : « Quand elles se produisent, c’est pour aller dans la direction dans laquelle tu es guidée, c’est l’univers qui te pousse« . Ainsi, les heures miroirs (comme 11h11, 22h22) que vous apercevez en regardant votre montre, les nombres angéliques (tels que 222, 666 ou 999) qui s’affichent sur une plaque d’immatriculation, une plume blanche tombant juste devant soi, seraient des signes de synchronicité. « Il peut être intéressant d’aller chercher du sens dans les symboles (ça peut être le symbole d’un objet que vous avez trouvé dans la rue) et les associer à ce qu’on vit actuellement d’important« , déclare Isabelle Fontaine, psychothérapeute, au Journal des Femmes. Ces synchronicités peuvent avoir une résonance émotionnelle particulière. C’est ce que le philosophe allemand, Rudolf Otto, appelle la numinosité, c’est-à-dire le sentiment de présence absolue, presque divine. Jung précise que le numineux « consiste en ce que l’on se sent subjugué« .
Néanmoins, Isabelle Fontaine conseille de ne pas essayer de chercher ces synchronicités partout ni de trouver une réponse. « Généralement, les synchronicités surviennent par ‘paquet’, et il y a un véritable équilibre à trouver. Jung disait d’ailleurs que si le sens existe, le non-sens existe également ». Si les synchronicités peuvent être un petit coup de pouce conscient ou inconscient, si elles bousculent l’esprit rationnel ou si elles amusent, la psychothérapeute rappelle que « l’idée est d’accepter que quelque chose qu’on ne comprend pas vient nous bouleverser, mais de ne pas sombrer dans la peur, l’illusion ou dans l’excès inverse, de perdre le contact avec la réalité« . Et de prévenir : « Le risque serait alors de devenir dépendant de cette ‘aide‘ que représente la synchronicité« .