Le Monde nous apprenait, le 7 avril, que les rivières européennes grouillent de microplastiques. Merci aux milliers de milliards de filtres de cigarettes jetés chaque année au sol, filtres dépourvus de tout effet protecteur sur la santé – un mensonge éhonté – mais redoutables polluants du fait de leur composition cellulosique.

L’occasion de rappeler que le tabac n’est pas seulement un tueur d’humains (8 millions de morts par an, dont 75 000 en France ; d’immenses cortèges d’handicapés du souffle), mais aussi un massacreur de planète, comme le rappelait l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans un rapport paru en 2022 : 600 millions d’arbres abattus, 200 000 hectares de terres agricoles gaspillés, 22 milliards de tonnes d’eau perdues, 84 millions de tonnes de CO₂ relâchées chaque année, des particules fines à proportion de gigantesques feux de forêt, et les mégots, toujours eux. Tout cela pour un produit toxique et inutile.

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Le tabac tue, asphyxie, handicape ses consommateurs – 1,25 milliard dans le monde, 12 millions en France (31 % des 18-75 ans) – et leurs proches – jusqu’aux enfants au berceau. L’industrie cigarettière pollue, détruit, empoisonne les milieux naturels. Mais comprend-on que le tabac nuit aussi à la santé commune, qui articule santé humaine, santé des écosystèmes et santé des sociétés ? Une société en bonne santé garantit des droits partagés, un accès équitable aux ressources et l’absence de violences structurelles – définies comme « les contraintes qui grèvent le potentiel d’un individu ou d’un groupe du fait même des structures et institutions ». Elle conditionne les santés humaine et environnementale. Et elle ne se construit pas à coups de recettes palliatives, mais par des trajectoires nouvelles, des ruptures de cadre, des révolutions comportementales. Et par le refus lucide des faux « états de fait ».

39 milliards d’euros d’économie

Comment le tabac s’attaque-t-il à la santé des sociétés ? D’abord en les appauvrissant globalement. En France, 39 milliards d’euros de produit intérieur brut (PIB) sont perdus chaque année du fait de ses effets sur la productivité de ses victimes (santé physique, santé mentale – très souvent –, carrières écourtées par le handicap ou la mort). A l’échelle mondiale, on parle de 2 000 milliards. A cela s’ajoutent les coûts de santé directs. Tout cet argent pourrait contribuer à plus d’équité, de prospérité, à de meilleurs services publics.

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