« Notre monde », de Luana Bajrami.

L’AVIS DU « MONDE » – POURQUOI PAS

Second long-métrage de Luana Bajrami, après La Colline où rugissent les lionnes (2021), qui avait été présenté à Cannes à la Quinzaine des réalisateurs, Notre monde suit le destin de deux cousines. Zoé (Elsa Mala) et Volta (Albina Krasniqi) ont grandi ensemble et vivent dans un village reculé du Kosovo, en 2007, quelques mois avant l’indépendance du pays, acquise en 2008. Volta, qui a perdu ses parents, a été élevée par son oncle et sa tante. Aucun horizon pour les deux adolescentes, si ce n’est d’être casées un jour avec un mari.

Zoé est celle qui rêve, souhaite rejoindre la capitale, faire des études et devenir interprète de l’anglais. Volta se fait moins d’illusions, a le regard plus sombre, mais elle possède une voiture, qu’elle tient de son père, et conduit. Ensemble, les deux inséparables se font la malle et s’inscrivent en douce à la faculté de Pristina, partageant la même chambre à la cité universitaire. Elles déchantent vite, entre l’absentéisme des professeurs et le manque de perspectives. Peu à peu, leurs choix les éloignent l’une de l’autre.

Beauté meurtrie

D’origine kosovare, née en 2001 dans le Val-de-Marne, la réalisatrice et scénariste découverte comme actrice – Ibrahim (2020), de Samir Guesmi, L’Evénement (2021), d’Audrey Diwan… – réussit la première partie de son film, sélectionné à Venise (Orizzonti), en nous attachant à ces deux adolescentes qui ont la fureur de vivre et se bercent d’illusions. L’utilisation d’archives dès les premiers instants situe rapidement le contexte familial et, surtout, politique : la guerre du Kosovo s’est terminée en 1999, le pays a été placé sous protectorat des Nations unies, mais il a fallu attendre 2008 pour qu’il soit reconnu comme une nation à part entière.

Cette attente interminable déteint sur les étudiants, qui ont le sentiment d’être oubliés. Ils se mettent à protester mais n’ont pas encore les gestes. Lors d’une scène assez cocasse, ils apprennent à sortir de leur timidité et se mettent à crier comme il se doit, le poing levé.

Si les deux actrices forment un duo convaincant, le récit se dissout rapidement dans les clichés d’une jeunesse désenchantée, installant un sentiment de déjà-vu. Balade à moto pour Volta, cheveux au vent, derrière son petit copain, passage dans une boîte à hôtesses pour Zoé, où elle dévoile une autre féminité devant un public de militaires. La réalisatrice capte ce moment en se concentrant sur le visage du personnage, sa beauté meurtrie et son envie d’y croire encore.

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