Depuis le début de l’année, plus de 20.000 migrants ont tenté la dangereuse traversée de la Manche en direction de l’Angleterre.
Pour les en empêcher, plus de 1700 forces de l’ordre sont déployées sur le littoral nord.
TF1 a suivi ces derniers, ainsi que des bénévoles d’associations portant secours aux candidats à la traversée.

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Les enquêtes de FX

De Boulogne-sur-Mer jusqu’à Calais (Pas-de-Calais), dès que la météo maritime le permet, des réseaux de passeurs cachés dans les terres surgissent en quelques minutes sur les plages du littoral français. Organisés comme des mafias, ils tentent d’embarquer des dizaines de migrants candidats à la traversée vers l’Angleterre , sur des bateaux pneumatiques surchargés, comme le montrent les images du reportage du 20H en tête d’article. 

Pour empêcher ce périlleux voyage, ce sont plus de 1.700 forces de l’ordre qui sont déployées sur 110 kilomètre de côtes françaises, de jour comme de nuit. Les embarquements sont « organisés comme pour les trafics de stupéfiants », raconte à notre équipe Anthony Leulliette, officier de commandement de nuit à Calais. Celui-ci note la violence grandissante des passeurs à l’égard de ses agents : « Ils vont préparer des sacs de ballast de chemins de fer, préparer des projectiles, des cailloux, pour que si les forces de l’ordre interviennent au moment de la livraison, ils puissent protéger le déchargement. » 

Les gilets de sauvetage sont rares

Au commissariat de Calais, la police a entreposé les bateaux gonflables confisqués dans les derniers jours, ainsi que quelques rares gilets de sauvetage : « Souvent, c’est les enfants et les femmes qui ont des gilets. Pas les hommes », note l’officier de commandement.

À bord de véhicules flambants neufs achetés par leurs voisins anglais, les forces de l’ordre françaises quadrillent donc la côte, à la recherche de mouvement ou de matériel suggérant une prochaine traversée. Ils sont appuyés par des avions de Frontex , l’agence européenne de garde-côtes. Ils gardent aussi un œil sur les camions à destination de l’Angleterre, dans lesquels certains migrants tentent également leur chance : ces derniers « ouvrent les portes arrière et ils montent dans les camions, ou ils se cachent dans les trappes qui sont sur les côtés des » véhicules, explique Anthony Leulliette.

Un peu plus loin, une centaine de migrants a établi un campement dans une forêt, en attendant de tenter leur chance. Les policiers se contentent d’assurer une présence pour sécuriser les lieux, mais n’interviennent pas : « Il y a forcément des passeurs qui sont là, mais on ne peut pas faire la différence entre un passeur et un exilé », explique l’officier de commandement.

« Ils ne veulent pas rester en France »

Ces migrants survivent notamment grâce à l’aide alimentaire qui leur est distribuée par l’association « Salam » : la distribution, normalement interdite, est tolérée par les forces de l’ordre. Yolaine Bernard, bénévole depuis plus de 15 ans, ne cache pas son désarroi face à la situation de ceux à qui elle vient en aide : « Ils ne veulent pas rester en France. Leur objectif, c’est l’Angleterre. Et ici, on les empêche de partir et on les empêche de rester. Donc, ils ne savent plus, et leur dernière chance, c’est l’Angleterre. D’où tous les risques qu’ils prennent, avec tous les morts qu’il y a eu cette année. » Youssef, un jeune érythréen, le confirme à notre équipe : « Oui, je veux Londres, mais pour le moment, je vis ici.« 

51 personnes sont décédées en tentant de traverser la Manche depuis le début de l’année, dont quatre migrants ce samedi 5 octobre. Sur la plage de Wimereux, station balnéaire huppée du Pas-de-Calais, Brigitte ouvre l’œil, à l’affut de naufragés en détresse. Cette bénévole de l’association Osmose surveille la météo maritime pour tenter de prédire les tentatives de traversées. « On sait qu’on va voir des choses qui sont difficiles à voir et il faut qu’on soit prêts. Comme quand on part à la guerre, il faut qu’on soit prêt », martèle-t-elle, émue : « Ce sont des gens comme nous, on pourrait être à leur place. »


IM | Enquête : François-Xavier MÉNAGE et Olivier CRESTA

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