Dans une boutique Michael Kors, à Los Angeles (Californie), en novembre 2011.

Manifestement, l’Etat fédéral américain n’aime pas les fabricants de sacs à main. Ou il les aime trop. En bloquant, ce lundi 22 avril, le mariage annoncé, et librement consenti, entre les deux leaders américains du domaine, la Federal Trade Commission (FTC) s’est attiré une volée de bois vert de la part de l’acquéreur, le groupe Tapestry. « La FTC ne comprend rien aux consommateurs et à la manière dont le marché fonctionne », a réagi l’entreprise, à l’annonce de la nouvelle.

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Propriétaire des marques Coach, Kate Spade et des chaussures Stuart Weitzman, elle entend avaler pour 8,5 milliards de dollars (environ 7,96 milliards d’euros) son homologue Capri, dont le catalogue comprend les sacs et accessoires Michael Kors, la mode de Versace et les chaussures de Jimmy Choo. Ensemble, ils constitueraient un grand groupe américain du luxe, avec 12 milliards de dollars de chiffre d’affaires et 33 000 salariés dans le monde. Ils s’approcheraient ainsi de géants comme LVMH, presque huit fois plus gros, ou Kering, plus proche avec ses 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

En dépit de cette taille modeste au niveau mondial, la fusion inquiète la FTC pour une bonne raison. Elle donnerait au nouveau groupe une part prédominante sur le marché qu’elle définit comme du « luxe abordable ». Car Coach et Michael Kors ne boxent pas dans la même catégorie que Vuitton ou Gucci. Leurs sacs à 150 ou 400 euros sont dix fois moins chers que les premiers prix des européens. C’est toute la subtilité du travail des autorités de la concurrence de déterminer le marché pertinent. D’où les polémiques sans fin.

Un argument plus surprenant

Mais la FTC a ajouté un autre argument plus surprenant. Dans son attendu, elle souligne que cette opération sera également préjudiciable aux employés des deux sociétés qui ne pourront plus faire jouer la concurrence sur les salaires et les possibilités d’embauche. Sous la houlette de Lina Khan, nommée, en 2022, par le président Joe Biden, l’administration opte pour une approche plus politique face à la concentration croissante dans les grandes entreprises américaines.

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D’où les procédures à répétition contre des champions du Web comme Google ou Microsoft, dont les performances en matière de position dominante sont largement plus spectaculaires que celles des rois de la maroquinerie. Ces derniers n’ont d’ailleurs pas encore perdu la partie puisque l’affaire est désormais portée en justice. On ne mesure pas toujours la portée politique et économique d’un petit sac à la mode.

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