La France est-elle capable, sinon de relocaliser une partie de son industrie, au moins d’éviter que la perte de son potentiel productif ne s’aggrave dans les mois et années à venir ? Si le projet de cession d’une des filiales de Sanofi à un fonds d’investissement américain a donné une acuité particulière à cette question, la situation du secteur automobile nourrit également de fortes inquiétudes.

En effet, à l’occasion du Mondial de l’automobile, mi-octobre à Paris, une vague de fermetures d’usines a été annoncée par les constructeurs en France comme ailleurs en Europe, par exemple en Allemagne ou encore en Italie, où les salariés de plusieurs entreprises se sont mis en grève. Pour expliquer cette situation, les dirigeants d’entreprises automobiles mettent en cause la forte diminution des ventes de véhicules électriques et la concurrence de la Chine.

Les menaces qui pèsent sur l’emploi donnent des ailes à tous ceux qui considèrent que la réglementation européenne (notamment l’interdiction de la vente de véhicules thermiques neufs en 2035, mais aussi les normes sur le CO2 qui doivent entrer en vigueur dès 2025) a été imposée de façon trop rapide aux constructeurs et qu’il est urgent de la remettre en cause.

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Une occasion pour plusieurs courants politiques, en France et dans les pays voisins, de contester tout à la fois l’emprise de la bureaucratie européenne, les objectifs de réduction de 55 % des émissions à l’horizon 2030 adoptés par les Etats membres et le rythme – sinon la nécessité même – de l’électrification de la flotte de voitures neuves.

Que répondre à cela ? D’abord que les émissions de gaz à effet de serre des transports sont non seulement les plus élevées (elles représentent plus de 30 % des émissions françaises), mais aussi celles qui ont le plus augmenté ces dernières années en France et en Europe. La moitié d’entre elles sont produites par les véhicules particuliers.

Véhicules électriques chers et lourds

L’électrification du parc automobile est donc une absolue nécessité pour lutter efficacement contre le changement climatique, mais aussi pour protéger la santé des populations, notamment en raison de la toxicité des particules fines. Il faut ensuite rappeler que les déboires des constructeurs français ont été provoqués certes par une pression réglementaire croissante et l’absence de politiques publiques volontaristes, mais aussi par des choix auxquels les fabricants ont largement participé.

C’est ce qu’expliquaient, en septembre, des chercheurs du Groupe d’études et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’automobile, un réseau international de recherche en sciences sociales consacré au secteur. Les auteurs rappellent que la plupart des constructeurs, en France et en Europe, ont choisi de produire des véhicules électriques à la fois chers et lourds destinés à une clientèle aisée qui leur a un temps garanti de confortables gains. Inconvénients : ces véhicules s’avèrent à la fois inaccessibles aux classes populaires et moyennes, en nombre insuffisant pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de CO2 et excessivement consommateurs de ressources.

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